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Le grand feu du faubourg Saint-Jean

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Dans l’histoire de la ville de Québec, un des grands feux fut celui du faubourg Saint-Jean en juin 1881. Et, par bonheur, l’hebdomadaire montréalais L’Opinion publique nous propose le 11 août 1881 le témoignage original d’un journaliste français. Après un séjour à Baie-Saint-Paul, M. Foursin-Escande prend le bateau, le soir du 8 juin, semble-t-il, en direction de Québec.

C’était la nuit, et j’étais resté seul sur le pont du bateau […] lorsqu’en doublant l’île d’Orléans une lueur terrible vint m’arracher à mes rêveries.

Québec brûle, et tous ses quartiers étagés en amphithéâtre paraissent embrasés à la fois.

Quelle épouvante et quel saisissement !

À plus tard les récits de promenades, les croquis de riants paysages et de villages heureux.

Québec, la vielle capitale, brûle !

La première ville fondée dans le Nouveau Monde, la plus glorieuse, la plus belle et la plus pittoresque du continent, est consumée. Québec, le berceau de la nation canadienne, seconde nation française; Québec, la ville historique, la ville littéraire, la ville artiste; Québec, la cité patriotique, la ville sainte, la gardienne du tombeau de l’héroïque Montcalm, gardienne de nos gloires et du drapeau victorieux à Carillon; Québec va disparaître dans cette effroyable conflagration.

Nous débarquons dans la basse-ville, abandonnée et silencieuse, non atteinte encore, et tout le monde court vers les quartiers incendiés. Tout semble fini, et le vent, portant les flammes dans la direction de la campagne [vers l’ouest donc], va sauver le reste de la ville et garantir le magnifique palais du Parlement et des ministères, situé non loin de là et qui est une copie fidèle de notre palais du Louvre et des Tuileries.

Mais les deux quartiers, les quartiers Saint-Jean et Montcalm, 700 maisons, une église et divers monuments sont anéantis; quinze rues, parmi lesquelles les rues de Richelieu, d’Aiguillon, Saint-Jean, Berthelot, Claire-Fontaine, de Latourelle, etc., n’existent plus, 2,500 familles sont sans asile.

Les pertes en argent s’élèvent à quinze millions. Quatre millions seulement sont couverts par les compagnies d’assurances.

Ce malheur crée un grand devoir à la France.

Les maisons qui viennent d’être consumée se pavoisaient de son drapeau aux jours de réjouissances et de fêtes nationales; les malheureux qui errent autour de cet immense brasier, avec leurs enfants demi-nus et leurs meubles noircis, sont des Français qui ne reconnaissent pas d’autre emblème national que les couleurs tricolores.

Puis, après avoir énuméré plus d’une vingtaine de noms de personnalités françaises qui connaissent le Québec d’alors pour y être venues, le journaliste les presse d’organiser une souscription pour aider les sinistrés. «C’est à vous tous qu’il appartient de faire appel à l’inépuisable charité française, de faire appel aux journaux, d’ouvrir des listes de souscription, de former un comité : le comité de la reconstruction de Québec.»

 

L’illustration provient de L’Opinion publique du 23 juin 1881. On la retrouve sur le site de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec au descripteur «Incendies».

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