Du poète russe Nicolas Sabolotzki (1903-1958)
Lodénikov
Lodénikov suivait un nébuleux croissant
Qui montait dans le ciel au-dessus du village ;
Et la voix du silence, et les voix des herbages,
Réunis, lentement se transformaient en chant.
La nature chantait, le bois levant la tête,
Chantait avec le pré, pendant que de son eau
La rivière tintait, ainsi qu’un clair anneau.
De son pas régulier, au son de la guitare,
Superbe, Lodénikov marchait à travers champs ;
Sur ses bottes les fleurs se penchaient tendrement ;
De menus moucherons, ainsi que vers un phare,
Volaient vers sa poitrine… alors se réveillant,
Tout à fait isolé dans sa paresse heureuse,
Lodénikov put voir, allumés en veilleuses,
Briller autour de lui, nombreux, les vers luisants…
Anthologie de la poésie russe, Édition de Katia Granoff, Préface de Brice Parain, Paris, Éditions Gallimard nrf, 1993, p. 469.