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« Elle était déchaussée, elle était décoiffée… »

Elle était déchaussée, elle était décoiffée,

Assise, les pieds nus, parmi les joncs penchants ;

Moi qui passais par là, je crus voir une fée,

Et je lui dis : Veux-tu t’en venir dans les champs ?

 

Elle me regarda de ce regard suprême

Qui reste à la beauté quand nous en triomphons,

Et je lui dis : « Veux-tu, c’est le mois où l’on aime,

Veux-tu nous en aller sous les arbres profonds ?

 

Elle essuya ses pieds à l’herbe de la rive ;

Elle me regarda pour la seconde fois,

Et la belle folâtre alors devint pensive.

Oh ! comme les oiseaux chantaient au fond des Bois !

 

Comme l’eau caressait doucement le rivage !

Je vis venir à moi, dans les grands roseaux verts,

La belle fille heureuse, effarée et sauvage,

Ses cheveux dans ses yeux, et riant au travers.

 

Victor Hugo, « Les Contemplations », 1856, Dans Jean-Joseph Julaud, Petite anthologie de la poésie amoureuse, Paris, Éditions First, 2008.

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