«Fin de semailles»
Le soir versait le calme et l’oubli des travaux.
Tout était terminé. L’homme avec ses chevaux
S’en retournait vers sa demeure
Ayant pour tempérer la longueur du chemin
La blonde vision des moissons de demain
Et du repos de tout à l’heure.
* * *
Il était harassé, poudreux, mais satisfait
Sentant que devant Dieu son devoir était fait,
Que les temps deviendraient prospères
Que ses peines d’un jour, ses sueurs d’un moment
Iraient au fond du sol pour faire le froment
Se joindre à celles de ses pères.
* * *
Il marchait lentement avec un air rêveur.
L’arôme du terroir, âcre et plein de saveur
Passait avec la brise douce.
Le ciel s’emplissait d’ombre et de mourantes voix.
Et lui voyait l’oiseau se blottir dans les bois
Le ruisseau dormir dans la mousse.
* * *
Mais il ne songea pas que dans l’azur terni
Commençait justement ce qu’il avait fini
Et que, quand l’heure étend ses voiles
Le geste le plus beau qu’ici-bas l’on peut voir
Par un bras invisible est refait chaque soir
Avec des semences d’étoiles.
Clovis Duval.
Le Bien public (Trois-Rivières), 22 avril 1910.
À Péribonka, au lac Saint-Jean, sur la galerie de la maison paternelle d’Eva Bouchard, vers 1920, on dit une prière avant les semailles. Cette photographie est déposée à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Québec, Collection initiale, Photographies, cote : P600, S6, D5, P535.