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On pêche au flambeau et au dard à Saint-Lambert

Au début du 20e siècle, en juillet, la population de Saint-Lambert, en face de Montréal, aime pêcher dans le fleuve, la nuit venue, au flambeau et au dard. Le journal La Presse du 17 juillet 1900 le confirme.

La pêche au flambeau est fort en vogue à Saint-Lambert. Presque tous les soirs, les citoyens qui ont des dispositions pour ce genre de sport vont en canots et, à l’aide d’un flambeau et d’un dard, font des pêches miraculeuses. Hier soir, M. Odilon Labadie, fils de M. le notaire Labadie, a pris un magnifique poisson armé de trois pieds et tout récemment, au cours d’une autre pêche, plus de soixante livres de poissons ont été pris. Avis aux amateurs.

Cette manière de pêcher est fort ancienne. Avant même la venue des colons français en Amérique, les Amérindiens la pratiquent, la nuit. Deux hommes prennent place dans un canot. L’un mène l’embarcation, l’autre se tient debout à l’avant, où brûle un flambeau d’écorce. Ce dernier tient un nigog et surveille la venue des poissons. Dans leur article « La pêche en Nouvelle-France aux XVIIe et XVIIIe siècles » (Revue d’Ethnologie du Québec, no 2, 1975), les historiens Jean-Paul Massicotte et Claude Lessard décrivent ainsi ce harpon : Il a l’apparence d’un bâton fourchu à l’extrémité duquel sont fixés une pointe centrale et deux crochets latéraux qui retiennent le gibier.

Les Français apprendront donc des Autochtones à pêcher au flambeau, mais plutôt qu’au nigog, ils recourront au trident, appelé aussi dard. Dans son article « Pour une esquisse biogéographique du Saint-Laurent » (Cahiers de géographie de Québec, no 23, septembre 1967), le botaniste et ethnologue Jacques Rousseau (1905-1970) affirme qu’on pêche au dard et au fanal aussi tard que durant les années 1960. Mais il ajoute : Cette dernière technique, apprise des Amérindiens, n’a plus la même faveur qu’autrefois, sauf auprès des braconniers.

Le poisson armé dont fait mention La Presse est le Lépisosté osseux (Lepisosteus osseus, Longnose Gar), un long poisson mince qui peut mesurer jusqu’à 1, 50 m, véritable poisson fossile du groupe des Holostéens très répandu au Crétacé, il y a plus de 65 millions d’années. Le naturaliste Claude Mélançon, dans son livre Les Poissons de nos eaux (Montréal, Librairie Granger, 1936), nous dit qu’il habite les eaux douces, qu’il est commun dans le lac Champlain, le lac Saint-Louis et certaines autres parties du fleuve Saint-Laurent. On le prend sans grande difficulté au filet et au trident, ajoute-t-il, mais comme il semble tout écailles et tout arêtes, personne n’en veut manger. Les chiens eux-mêmes le dédaignent.

On pêchait aussi au dard l’esturgeon, l’anguille et même le saumon, dans certaines rivières.

Le Pêcheur au nigog, qui coiffe cet article, est l’œuvre du sculpteur Louis-Philippe Hébert, placée devant le portail de l’Hôtel du Parlement à Québec, tout juste au-dessous de La Famille amérindienne.

 

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