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L’entrée principale du Parlement à Québec

Dans le journal La Patrie du 3 février 1891, un chroniqueur, qui signe M. O’R. traite du sculpteur québécois Louis-Philippe Hébert, qu’il vient de rencontrer à Paris. Il s’intéresse en particulier à son travail d’ornementation de la façade de l’Hôtel du Parlement à Québec. Arrêtons-nous à ce qu’il dit de l’entrée principale de l’édifice.

C’est en 1886 que le gouvernement provincial, sur l’avis d’une commission spéciale, confia cet important travail à M. Hébert. Le statuaire avait soumis son projet à la commission qui, très séduite par son originalité et son caractère, n’hésita pas à lui donner son adhésion. Toutefois, l’œuvre était si considérable, d’une si grande envergure; elle comprenait des morceaux multiples et de natures si diverses que M. Bourassa, président de la commission, conseilla à M. Hébert de se rendre à Paris.

Là, il s’imprégnerait des modèles célèbres et des traditions des grands maîtres, en même temps qu’il trouverait pour le coulage en bronze de ses œuvres des éléments bien difficiles à rencontrer en Amérique. Le gouvernement provincial exprima le même désir, et, dès 1887, M. Hébert allait s’installer à Paris, dans le vaste atelier de l’impasse du Maine qu’il occupe encore aujourd’hui.

Depuis lors, il travaille sans relâche et plusieurs morceaux sont déjà achevés. Nous avons admiré à Paris — à l’exposition universelle de 1889 — et l’on peut voir aujourd’hui, décorant la fontaine frontispice du Parlement provincial, le beau groupe dit les Algonquins [On l’appelle aujourd’hui La Famille amérindienne].

C’est un bronze colossal, fait justement observer M. Louis Fréchette, destiné à perpétuer le souvenir des races primitives qui habitaient le Canada à l’arrivée des Européens.

Comme  figure centrale, le chef, debout, appuyé sur son arc, dans une attitude pleine de majesté, regarde son fils qui, à sa gauche et un genou en terre, lance d’un bras nerveux une flèche vers un but invisible. À sa gauche, la mère, accroupie, allume le feu du campement, — entre elle et le chef, le dernier rejeton de la famille……..

Le sculpteur a voulu fixer dans un moule aussi impérissable que possible les traits, la physionomie et même les mœurs de ces naïfs et farouches enfants de la forêt à peu près disparus aujourd’hui. Il y a parfaitement réussi; ce groupe serré, cohérent et puissant dans son unité de mouvement et d’action, produit une profonde impression, et le jury des beaux-arts de l’exposition 1889 a rendu bonne justice en décernant à M. Hébert une médaille. […]

Dans le bassin situé en face du groupe cité plus haut, sera placé un pêcheur algonquin, pêchant à la nigogue. Le plâtre de cette composition, qu’on est en train de couler dans les ateliers de la célèbre fonderie Thiébaut, a figuré au salon de 1890. Il nous a particulièrement séduit.

Le vigoureux sauvage, au torse nu, aux membres musculeux et bien attachés, plein de hardiesse et de vie, est très original dans sa rudesse voulue. On éprouve, en le voyant, la sensation de l’homme des bois luttant pour la vie, et rarement, croyons-nous, le ciseau de M. Hébert n’a été plus heureux.

C’est l’été prochain que les Québecquois pourront apprécier ce morceau capital, appelé à produire un effet superbe de grandeur et de simplicité tout à la fois.

 

Sur la pêche au flambeau et le pêcheur à la nigog, voir cet article. Et puis pourquoi ne pas aller voir les belles de bronze des parterres de l’Hôtel du Parlement, une splendeur ?

Et remarquez bien derrière La Famille amérindienne, au-dessus de la porte d’entrée, le «Je Me Souviens» que l’architecte du Parlement, Eugène-Étienne Taché, tenait à faire inscrire. Par la suite, on en fera la devise du Québec. Devise exigeante. Qui oblige à un devoir de mémoire.

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