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«Tu es venu»

canova eros psyche baiser amoureux frissonTu es venu, ô toi qu’appelaient avec douceur et obstination mon silence, ma foi sereine,

Toi que cherchait mon silence que ne put distraire le tumulte des voix qui n’étaient pas la tienne,

Mon silence que ne surent tromper les appels qui n’étaient pas ta voix,

Ta voix pénétrante et pleine et vertigineuse d’amour,

Ta voix essentielle que je connaissais depuis toujours.

Tu es venu éblouissant et divin

Et les mains ouvertes en livrant ton destin.

 

Tu es venu et je savais que c’était toi,

Toi qui avais fait sangloter en moi le sang du désir, les pleurs de l’attente,

Toi que j’interrogeais dans mes soirs lourds et mes aubes ferventes,

Toi dont la simple démarche est une magnificence.

 

D’autres ont paru qui ont chanté, ou murmuré, ou crié :

«C’est moi !»

Mais mon oreille ne les écouta point et ma paupière resta secrète, car d’eux n’émanaient l’éclat ni le feu de ta présence.

J’aurais pu désespérer ou me distraire, tu tardais tant;

Mais puisque je savais que viendrait ce matin que voici,

Que tu naîtrais à l’horizon avant que ce jour ne disparût…

 

Tu es venu et tes mots sont doux et ton corps est somptueux, tes vertes prunelles sont des lagunes enchantées et ton sourire mord à tant de hardiesse !

Tu es venu et mes yeux se sont ouverts, et la vie, toute la vie, puissante, troublante et savoureuse est entrée en moi d’un élan éperdu.

 

Tu es venu et mon corps a compris sa jeunesse, ma gorge sa ferveur et mes mains leur tendresse.

 

Tu es venu, mais je ne t’ai point dit combien je t’avais choisi.

Tu es venu, mais je ne t’ai point dit combien je t’avais attendu.

 

Simone Routier, Les Tentations, Paris, Éditions de la Caravelle, 1934, p. 99-101.

L’illustration ci-haut — Psyché ranimée par le baiser de l’Amour — est la photographie d’un marbre du sculpteur italien Antonio Canova (1757-1822). On raconte que, ce jour-là, Éros [l’Amour] est devenu éperdument amoureux de la belle Psyché dès qu’il la vit. On retrouve cette œuvre au Musée du Louvre, à Paris.

Et comment ne pas se rappeler l’immense chant d’amour de Brigitte Fontaine.

Et puis Cora Vaucaire, cette chère, qui a chanté «Tu es venu».

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