Un citoyen craint les glissements de terrain dans sa paroisse
Saint-Pierre-les-Becquets est une paroisse sur les bords du Saint-Laurent en face de Batiscan, entre Gentilly et Deschaillons. Apparence qu’il pourrait se produire de graves éboulis. Un citoyen de l’endroit prend sur lui d’écrire à ce sujet au journal Le Trifluvien, un bihebdomadaire de Trois-Rivières. Ce dernier reproduit sa lettre le 31 décembre 1895.
M. le Rédacteur du Trifluvien,
Veuillez, s’il vous plaît, me réserver un tout petit espace dans les colonnes de votre journal pour y insérer ce qui va suivre. Je vous adressais, il y a quelques semaines, à propos des éboulis et des enfoncements de terrains menaçant plus que jamais une certaine partie de notre village, un article intitulé « Perturbation géologique», donnant pour conclusion les tristes conséquences que l’avenir pourrait réserver à un certain nombre de ses habitants.
Le caractère un peu prophétique donné à l’article parut agacer l’esprit d’un certain géologue et ébrécher sa science délicate, de façon à lui donner prise à une contestation presque générale des faits et probabilités qui y sont énoncés.
Maintenant, qui de nous avait raison ? Les ouvriers se hâtent actuellement de déplacer les bâtisses pour les empêcher de culbuter à la côte, la grande messe spécialement recommandée au prône par M. le curé de cette paroisse, le jour de Noël, et chantée le lendemain pour nous protéger contre cette catastrophe imminente, l’éveil en même temps donné par ce dernier, aux autorités municipales, pour agir dans ce sens et, enfin, les images des Saints placés aux endroits les plus menacés et au bas desquelles se lisent des prières pour prévenir un désastre imminent sont autant de preuves convaincantes et irréfutables à l’appui de mes assertions.
Nous sommes en 1895. Ici, on place des images de saints aux endroits que l’on croit les plus menacés. Et je ne peux m’empêcher de penser que, trois mois auparavant, en septembre 1895, devant l’immense incendie qui brûla sur la rive sud, on plaçait des statues près des maisons pour éloigner le feu. Absolument impuissant à l’un et l’autre endroit, on disposait là ces objets, ces talismans, espérant protection.
L’ilustration du fleuve Saint-Laurent vu des rives de Saint-Pierre-les-Becquets est de noukorama (Anouk Stricher) sur Flickr.