« Tout s’apaise et défaille à l’heure des étoiles »
Bien qu’à l’occasion ses poèmes soient trempés dans l’eau bénite, j’aime la poète originaire de Québec, Reine Malouin, née Voiselle (1898-1976), car parfois elle se montre audacieuse pour son temps. Rappelez-vous ces deux poèmes extraits de son premier recueil.
La voici ici dans un texte sur la nuit.
Le soir pensif et doux vogue dans l’atmosphère.
Le rire est plus discret, le bruit plus affaibli ;
Les pavots débordant du vase somnifère,
Déversent lentement leur poussière d’oubli.
Le silence royal, fils des nuits et des songes,
Plus subtil qu’un parfum, plus traître qu’un remord,
Tresse de ses velours son faisceau de mensonges,
Et capture l’esprit dans ses filets retors.
Tout s’apaise et défaille à l’heure des étoiles :
Le zéphir se nourrit des souffles épuisés,
La fontaine se tait et la vasque s’étoile
De tous les feux mouvants, qu’au ciel, elle a puisés.
Le parterre égaré sous les fleurs en délire,
Roule un frelon repu dans deux brins de gazon.
Un lis plein de vertu, qu’un souffle veut élire,
Près d’une rose folle a perdu la raison…
Il monte de partout une ivresse jalouse,
La nuit, insolemment, fascine sans détour :
Une bouche emprisonne une vivante arbouse,
Et deux cœurs font d’un trait le cycle de l’amour !
Reine Malouin, Inviolata, Québec, 1950, p. 38s. L’ouvrage fut publié à compte d’auteur. À la dernière page, on lit « Achevé d’imprimer sur les presses du Soleil à Québec le 15 juillet 1950 pour le compte de l’auteur, 597, Sixième Rue, Québec, Canada ».
La photographie de Reine Malouin prise vers 1950 est déposée à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Québec, Collection Centre d’archives de Québec, Documents iconographiques, cote : P1000,S4,D83,PM27.