Connaissez-vous Jacques Prévert ?
Si ce n’est déjà fait, dépêchez-vous. Il est bien difficile de le résumer. Homme d’une sensibilité très fine, il a tant aimé s’amuser à retourner la vie comme un gant, histoire d’aller voir où vraiment elle se cache, s’il se trouve un éclairage autre que le conventionnel. Il n’était pas homme du premier degré, qui l’ennuyait. Sitôt qu’il apercevait une fêlure, il s’empressait de saisir le deuxième.
Je pensais posséder tous ses livres, mon bouquiniste Bernard Laforce m’en fait découvrir un nouveau, Soleil de nuit, chez Gallimard, 1980, 307 pages. Une réunion des textes écrits par Prévert et échappés entre 1936 et 1977. Un florilège de propos souvent inédits, et veuillez me croire, c’est pas le fond du panier. Une édition préparée par Arnaud Laster avec le concours de Janine Prévert. «Histoire de manifester au-delà de la mort, la présence vivante et rayonnante de Jacques Prévert, de son humour éclatant, de sa tendresse chaleureuse mais aussi de ses colères ardentes.» Extrait.
La lune et la nuit
Cette nuit-là je regardais la lune
Oui j’étais à ma fenêtre
et je la regardais
et puis j’ai quitté ma fenêtre
je me suis déshabillée
je me suis couchée
et puis alors la chambre est devenue très claire
la lune était entrée
Oui j’avais laissé la fenêtre ouverte
et la lune était entrée
Elle était là cette nuit-là dans ma chambre
et elle brillait
J’aurais pu lui parler
J’aurais pu la toucher
Mais je n’ai rien fait
je l’ai seulement regardée
elle paraissait calme et heureuse
j’avais envie de la caresser
mais je ne savais pas comment m’y prendre
Et je restais là… sans bouger
Elle me regardait
elle brillait
elle souriait…
Alors je me suis endormie
et quand je me suis réveillée
c’était déjà le lendemain matin
et… il y avait seulement le soleil
au-dessus des maisons.
Vous trouverez ici un billet où Jacques Prévert s’adresse à un raton laveur encagé, un véritable.
Il y a aussi ce billet de l’AFP lors de son décès en 1977.