La Journée internationale des Femmes (8 mars)
En février 1908, pour entrer au parlement de Londres, les suffragettes, se battant pour l’obtention du droit de vote, se cachent dans un fourgon qui devait contenir des tables et des chaises. Mais leur ruse est déjouée avant qu’elles accèdent à la Chambre des Communes.
L’hebdomadaire montréalais Le Bulletin, dans son édition du 23 février 1908, rend hommage à leur héroïsme.
Quel est l’écrivain qui se chargera d’écrire l’histoire, aussi pathétique qu’amusante, de la lutte des femmes en Angleterre pour la liberté du suffrage électoral ? L’objectif même de cette étrange croisade dût-il ne jamais être atteint, que les héroïques efforts des «suffragettes» ne sauraient être perdus pour l’histoire qui se doit de les illustrer pour l’édification des générations futures.
Les dernières épisodes [sic] de cette campagne féminine sont tellement empreints [sic] d’extraordinaire audace de la part de ces frêles créatures qu’on croirait rêver à la lecture des dépêches qui nous relatent les exploits des suffragettes, sous les fenêtres même du Parlement anglais.
Par leur indomptable ténacité et l’incroyable habileté de leur stratégie, ces femmes sont devenues la terreur du monde politique et le cauchemar de la police de Londres. Il s’en est fallu de peu qu’elles tinssent à leur merci la Chambres des Communes elle-même, et la façon dont la vigilance des autorités anglaises a failli être déjouée en cette circonstance unique a jeté sur cette campagne désormais mémorable une note humoristique digne des chapitres les plus célèbres de Dickens, le fameux écrivain anglais.
Il est, à notre avis, extrêmement regrettable que la police de Londres ait été informée du contenu du fameux véhicule, si innocent d’apparence, qui s’est approché, l’autre jour, de l’entrée principale du Palais de Westminster et d’où s’est échappée soudain cette horde menaçante de jupons au lieu d’une consignation de tables et de chaises que l’on croyait destinée à l’ameublement de quelques bureaux publics.
Nouveau cheval de Troie, le fourgon à meubles s’était introduit dans la place, sous l’œil paternel des constables anglais, renfermant dans son sein les bataillons ennemis.
Quel dommage qu’un si beau stratagème n’ait pas été couronné de plus de succès !
Voit-on d’ici le régiment enjuponné faisant irruption sur le parquet de la Chambre des Communes, et la panique qui s’en serait inévitablement suivie ?
Quel soupir de soulagement n’ont-ils pas dû pousser les représentants du peuple, à la nouvelle qu’un renfort de gardiens de la paix avait endigué le flot envahisseur ?
Mais si le coup est manqué, la partie n’est pas perdue. Attendons-nous à quelque nouvelle surprise. Avec les femmes, il ne faut désespérer de rien, et les farouches cerbères du palais législatif anglais n’ont qu’à bien se tenir.
Dussent-elles s’introduire par les soupiraux de la cave, les suffragettes pénétreront dans la forteresse parlementaire, car en attendant le suffrage qu’elles réclament les femmes d’Angleterre ne craignent pas la souffrance.
Elles sont décidées à vaincre, et les politiciens qui leur refusent le droit de voter, après avoir sollicité leur participation aux luttes électorales, apprennent tous les jours à connaître davantage la valeur de leurs dignes adversaires.
Ci-haut, Marie Lacoste Gérin-Lajoie, l’un des premières suffragettes québécoises. La photographie provient de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec dans le Vieux-Montréal, Fonds Famille Landry, Souvenirs de famille, Photo-montages, cote : P155, S1, SS2, D34.