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Parlant hibou

hibou dans la fenetreIl y a cent ans, les habitants de la région de Québec vivent une véritable relation d’amour-haine avec le «hibou». Et jamais les journaux ne précisent de quelle espèce de hibou il s’agit. Tantôt on l’expose, vivant ou naturalisé, dans une vitrine, tantôt on prend plaisir à le tuer purement et simplement.

D’ailleurs, en 1903, la loi québécoise de la chasse dit qu’«il est défendu de tuer en n’importe quel temps les oiseaux percheurs, tels que : les hirondelles, les tritris, les fauvettes, les moucherolles, les pies, les engoulevents, les pinsons (rossignols, oiseaux rouges, oiseaux bleus, etc.. ), les mésanges, les chardonnerets, les grives (merles, flûtes des bois, etc.,), les roitelets, les goglus, les mainates, les gros-becs, l’oiseau-mouche, les coucous, etc., excepté les aigles, les faucons, les éperviers, et autres oiseaux de la famille des falconidés, les hiboux, le pigeon-voyageur (tourte), le martin-pêcheur, le corbeau, la corneille, les jaseurs, (récollets), les pies-grièches, les geais, les pies, les moineaux, les étourneaux».

Tournons les pages de journaux au sujet des «hiboux» dans la région de Québec.

Le 9 janvier 1902, le quotidien L’Événement (Québec) écrit : On voit dans l’une des grandes vitrines des magasins Z. Paquet un oiseau remarquable. C’est une chouette vivante à tête lisse, notable par la blancheur de son plumage, ce qui, dit-on, est assez rare : le gris moucheté étant généralement la couleur à la mode parmi la gent hiboue.

Le 15 janvier 1890, on lit dans La Minerve (Montréal) un nouvelle provenant de Lévis : Ces jours derniers, un nommé Joseph Gosselin, forgeron, de Lévis, a capturé un hibou, que les connaisseurs disent être âgé de 75 ans. Le chasseur l’a vendu $5 à un marchand de Lévis. Trois jours plus tard, La Tribune, de Saint-Hyacinthe, ajoute que ce hibou «mesure cinq pieds d’envergure» [un mètre 50].

Le 23 septembre 1908, deux jeunes tentent d’abattre un hibou dans le faubourg Saint-Roch, à Québec. Le Soleil du lendemain écrit : «Un hibou, venu on ne sait d’où, est venu se percher hier soir dans un des arbres de l’Avenue conduisant du pont situé sur la rue Gignac [aujourd’hui rue de la Maréchaussée] au Parc Victoria. Deux jeunes gens ont tenté d’abattre le gibier ailé mais n’y purent réussir, le hibou ayant pris son vol dans la direction des arbres en face de l’Hôpital général.»

Le mois de décembre 1884 sera difficile pour les «hiboux» de Québec. Le 6 décembre, sous le titre «Oiseaux nocturnes», Le Canadien constate : «Pour peu que cela continue, il va nous falloir renoncer à mentionner le trépas de tous les hiboux que l’on abat de ce temps-ci dans la ville même. Mardi soir, c’était au tour de M. Alain, marchand de ferronnerie de St Sauveur, à en abattre un dans les arbres qui ornant la façade du presbytère. Jamais, croyons-nous, ces oiseaux nocturnes n’ont été vus partout en aussi grand nombre.»

Dans le faubourg Saint-Jean, Napoléon Giroux est bien heureux de son coup de fusil le dimanche 9 décembre 1906. Hier matin, vers les 11 heures, M. Napoléon Giroux, qui tient un étal de fruits et de bonbons au marché Berthelot, a fait une belle chasse en abattant un hibou mesurant près de quatre pieds d’envergure, dans l’un des arbres en face du bon Pasteur. Il y a quelques années, M. Giroux tuait un hibou dans un des arbres de la rue Scott. Le plus beau de l’affaire, c’est que lorsqu’on a été avertir le chasseur, il prit le temps d’aller emprunter un fusil, le sien étant brisé, la crosse se trouvant séparée du canon, et que, n’ayant pas réussi à trouver une arme, il se servit de sa carabine à deux coups, joignant les deux pièces avec une petite pièce de bois. Et maître hibou qui attendait tomba blessé à l’aile gauche du premier coup. L’oiseau nocturne, qui semble être un jeune, fera un très bel ornement, lorsqu’il sera empaillé. (Le Soleil, 10 décembre 1906)

Toujours à Québec, Théodore Lemieux, lui, en a attrapé un vivant, selon La Patrie du 11 décembre 1880. «M. Théodore Lemieux, gardien du cimetière St-Sauveur, a été assez heureux pour s’emparer d’un hibou vivant. M. Lemieux venait de déposer à ses pieds une poule qu’il portait à la maison lorsque l’oiseau de proie fondit sur elle. Ce hibou est d’une taille superbe, de la famille des grands ducs, et a été vendu un fort joli prix à un amateur.»

Et les tueries de décembre 1884 se poursuivent. «Toujours les hiboux. Un de ces oiseaux nocturnes étant venu se poser sur la galerie en arrière de la résidence de M. G. Guay, N. P., rue du Pont [dans le faubourg Saint-Roch], celui-ci l’abattu d’un coup de fusil.» (Le Canadien, 13 décembre 1884)

Toujours dans le faubourg Saint-Roch : «Est-ce le dernier ? Un hibou qui s’est perché vendredi [le 12] sur un poteau de téléphone, rue de la Couronne, a été abattu par M. Blais, demeurant dans les environs.» (Le Canadien, 15 décembre 1884)

L’année suivante, dans Le Canadien du 18 décembre 1885 : «Visiteur emplumé. Mardi, un hibou de large envergure qui s’était blotti sur un des arbres de l’Esplanade, a été abattu par un citoyen des environs.»

 

L’image ci-haut est extraite de l’ouvrage Extrait de David M. Bird, Les petits animaux sauvages autour de la maison, Comment s’en accommoder, Illustrations de Sandra Letendre, Centre de conservation de la faune ailée de Montréal, 1987, p. 96.

2 commentaires Publier un commentaire
  1. Francine lessard #

    Mon dieu, c’est triste ces histoires de hiboux!
    Alors qu’on est chanceux si on en voit un dans sa vie, ces gens les éliminaient un à un sans pitié et sans motif apparent!
    Peut-être un mélange de peur et de fierté de se sentir plus fort que ces géants volants?
    J’aimerais bien en voir un ou deux sur le bord de ma galerie! Il ne me viendrait pas à l’idée de les priver de leur souveraineté!

    Bonne semaine
    Francine

    5 janvier 2015
  2. Jean Provencher #

    Vous avez tellement raison, chère Francine. Et je me demande pourquoi ces mentions pleuvent dans la région de Québec et qu’on n’en trouve pas ailleurs.

    Et parlant hibou, une fois, j’ai vu chez moi, entre chien et loup, un Grand-Duc absolument magnifique dans la mangeoire de panne de lard. J’aurais voulu en faire mon toutou tellement il était beau avec ses yeux froncés et foncés. Il me regardait longuement.

    5 janvier 2015

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