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Qu’on ne touche pas aux merles !

Je crois lire qu’en 1888, l’Ontario se donne une loi permettant d’abattre les Merles d’Amérique pour les manger. Comme ils nuiraient à la culture des fruits, on ferait ainsi d’une pierre deux coups. Or, il est rumeur que cette loi soit peut-être aussi mise en vigueur au Québec. Le chroniqueur du Monde illustré, Léon Ledieu, proteste avec humour le 16 juin 1888.

La loi de Lynch sera peut-être sanctionnée par le lieutenant-gouverneur et mise en vigueur, dans la province de Québec, d’ici à deux mois, et, chose assez singulière, le public semble à peine s’émouvoir de cette nouvelle, qui a été publiée dans tous les journaux de la province de Québec. […]

Le merle est-il l’ami ou l’ennemi de l’homme ?

Cette grave question va être soumise par l’hon. M. Lynch, à l’examen de nos braves législateurs qui devront donner leur décision, en se basant sur ce fait que cet oiseau est insectivore ou non.

S’il est déclaré que le merle se nourrit de grains et de fruits, au lieu de faire la guerre aux insectes, son sort est décidé et la sentence sera la mort.

Il paraît que les savants ne sont pas d’accord sur ce point; on dit le merle frugivore, insectivore et baccivore, et d’aucuns, plus concis, se contentent d’affirmer qu’il est omnivore.

Quoiqu’il en soit, je ne trouve pas très généreux ni très légal de condamner un accusé sans l’entendre, et je suis certain que si un député prenait en mains la défense de ce charmant chanteur, il n’aurait qu’à laisser la parole à son client pour gagner sa cause.

Si cependant il se trouvait des législateurs au cœur assez dur pour condamner ce petit virtuose, qui a sur les autres musiciens l’avantage de ne pas dire du mal de ses confrères, je proposerais — si j’étais député — de ne mettre à exécution la sentence que sur les merles blancs.

Les députés mariés devraient surtout défendre le malheureux accusé maintenant de se nourrir de blé et de pommes fameuses, tout comme le fait un honnête Canadien, car le merle est le modèle des maris et des pères de famille; il chante tout le temps que sa compagne emploie à construire son nid et à couver, puis il s’occupe de l’éducation de ses petits quand ils sont d’âge à apprendre le solfège.

Ce sont les seuls musiciens pour lesquels je voudrais demander grâce, et je ne voudrais pas imiter les Ontariens qui ont condamné les merles à mort, afin de pouvoir les manger légalement — question de goût et de ventre.

 

J’ai travaillé sur l’histoire de l’ornithologie québécoise, mais jamais ce fait n’était venu à ma connaissance. Aussi, ne puis-je pour l’instant, y aller d’une suite. Chose certaine, aujourd’hui, le Merle d’Amérique (Turdus migratorius, Robin) est protégé en vertu de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs.

Au sujet du Merle d’Amérique, j’ai proposé sur ce site quelques articles, en particulier celui-ci.

À Dosquet, dans la région de Lotbinière, une dame, amoureuse d’un merle, a même fait graver l’oiseau sur sa pierre tombale.

5 commentaires Publier un commentaire
  1. g. bussieres #

    c’est incroyable ! quel perte pour nos campagne si il n’y avait plus de merle pour glousser les soirs d’été.

    29 juin 2014
  2. Jean Provencher #

    Tout à fait, tout à fait, tout à fait !

    29 juin 2014
  3. Odette Plante #

    Ou encore pour nous réveiller au petit matin ! Mais pas ce matin !

    30 juin 2014
  4. Jean Provencher #

    C’est bien vrai, chère Odette, il est très matinal !

    30 juin 2014

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  1. Suite à notre article portant sur le projet de loi contre les merles | Les Quatre Saisons

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