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Et voilà maintenant le Merle d’Amérique

Nul oiseau québécois peut-être n’a porté autant de noms que lui. D’entrée de jeu, par exemple, le naturaliste et ornithologue James MacPherson LeMoine dans son Ornithologie du Canada (1861) l’appelle «le Merle ou rouge-gorge du Canada». Et il ouvre son texte ainsi, et voilà que l’oiseau s’appelle Grive :

«Parmi les six ou sept espèces de Grives que le printemps invite en nos climats, la plus connue est sans contredit la Grive erratique (Turdus migratorius) à laquelle les premiers colons anglais donnèrent le nom de Robin, à cause d’une prétendue ressemblance avec le Robin Red Breast de la Grande-Bretagne, lequel appartient à une toute autre famille. Buffon a décrit cette Grive sous le nom de Litorne du Canada, et les premiers Français qui se fixèrent en la Nouvelle-France lui octroyèrent le nom de Merle (qu’elle porte encore), par l’analogie de son cri bref et entrecoupé avec le Merle français, quoique sous la plupart des autres rapports elle en diffère entièrement

Au sujet du chant de cet oiseau, LeMoine écrit : «Le chant du Merle, sans égaler la mélodie de la Grive rousse, n’en est pas moins un agréable prélude au concert général que les autres chantres des bois nous préparent, à l’approche du printemps. Perché sur la plus haute branche de l’arbre qui ombrage la commune, il y fait résonner son bruyant clairon dès l’aurore, soit qu’il désire dissiper les soucis de sa compagne pendant le temps de l’incubation, soit qu’obsédé du Dieu de l’harmonie, il donne livre cours à ses transports. Loin d’être défiant comme le Merle de France, il recherche le voisinage de l’homme; les allées du jardin, le sillon fraîchement creusé, le parterre aux fleurs, la rive du limpide ruisseau où il prend son bain matinal, voilà où d’ordinaire on le retrouve après le lever du soleil.»

Dans Les Oiseaux du Canada (1883), Charles-Eusèbe Dionne l’appelle Grive erratique. En 1906, dans Les Oiseaux de la province de Québec, Dionne en parle cette fois-ci comme du Merle d’Amérique.

P. A. Taverner (Les Oiseaux de l’Est du Canada, 1920) mentionne que cet oiseau, qui a plus que tout autre des relations étroites avec l’homme, est «trop parfaitement caractérisé et connu pour demander une description spéciale». Il ajoute : «Le merle est aisément reconnu par ceux qui connaissent l’espèce, même à des grandes distances quand aucune des couleurs n’est visible, et cela grâce à sa silhouette, à sa façon de se tenir et aussi de voler».

Pour Claude Mélançon, dans Charmants voisins (1940), c’est là le «fils du soleil». «Il est l’oiseau dont nous avons accepté la foi. Chaque année, il vient quêter protection à notre porte. Cela est flatteur. Son geste proclame que nous avons bon cœur et sommes sensibles à la grâce. Son chant endort notre conscience. En l’écoutant nous nous pardonnons tendrement notre dureté et notre injustice habituelle envers les bêtes. Il est la preuve sautillant sous nos yeux que nous pouvons nous élever jusqu’à la contemplation de la beauté pure.»

Voyez aussi cette courte et belle histoire de monsieur Étienne Mercier avec un merle.

* * *

Dates des premières observations du Merle d’Amérique (Turdus migratorius, American Robin) chez moi.

1985 : 16 avril

1988 : 26 mars

1989 : 27 mars

1990 : 23 mars

1991 : 2 avril

1992 : 11 avril

1993 : 28 avril

1994 : 15 avril

1995 : 22 avril

1996 : 7 avril

1997 : 28 mars

2001 : 8 avril

2002 : 31 mars

2003 : 21 avril

2004 : 30 mars

2008 : 3 avril

2009 : 1er avril

2011 : 20 mars

2012 : 30 mars

2013 : 11 avril

2014 : 9 avril

2015 : 10 avril

2017 : 2 avril

2018 : 26 mars

Le merle est généralement discret à son arrivée et il met du temps à chanter. En 1983, par exemple, je ne me suis aperçu de sa présence que le 12 mai, et en 1984, que le 31 mai.

10 commentaires Publier un commentaire
  1. Nicole Richer #

    Bonjour,

    Je trouve très agréable de voir les dates d’arrivées de vos oiseaux. Je vais tantôt comparer vos arrivées avec celles indiquées dans mes carnets.

    Lors de ma promenade au jardin au retour du travail, une Hirondelle des granges se dirigeait droit vers l’étable de notre voisin. Selon mes notes, son arrivée est tôt ce printemps. Est-elle arrivée chez-vous ?

    Merci aussi, pour l’information concernant le Merle ainsi que pour les autres oiseaux. Je vais trouver un moyen pour garder ces informations dans mes carnets pour références futures.

    Bon weekend !

    11 avril 2014
  2. Jean Provencher #

    Merci beaucoup, chère Nicole. Vous êtes chanceuse de pouvoir encore apercevoir l’Hirondelle des granges. Ici, je ne la vois à peu près plus jamais et, depuis 1994, elle a cessé de nicher dans ma grange.

    Et vous avez raison, elle me semble bien tôt. Chez moi, ma mention la plus hâtive fut le 29 avril 1990.

    Belle fin de semaine à Vous aussi !

    11 avril 2014
  3. Francine Lessard #

    Bonjour à vous!

    J’ai vu le premier merle ce matin à St-Malachie! C’est tôt! Je l’ai bien vu avec des jumelles, c’est bel et bien lui!

    Bonne journée!

    27 février 2018
  4. Jean Provencher #

    Formidable ! Merci beaucoup. Il est tôt, dites donc. Je l’attends toujours chez moi.

    27 février 2018
  5. j’ai vu un merle le 30 janvier 2022 au lac trois saumons cté L’islet je crois que c’est assez rare est-ce-que le printemps est très proche?

    4 février 2022
  6. Jean Provencher #

    C’est une bien belle observation.

    Mais il faut savoir que le merle, de la fin novembre jusqu’en mars, est frugivore et non insectivore. Or, il descend vivre, l’hiver, en Nouvelle-Angleterre, faute de fruits ici au Québec. Si on le fournissait en fruit, il passerait l’hiver avec nous.

    Donc, même en plein hiver, il n’est vraiment pas loin de chez nous.

    Mais surveillez-le. Peut-être a-t-il trouvé un arbre fruitier dans vos parages.

    4 février 2022
  7. Anne Marie Garceau #

    Bonjour Jean

    Une histoire de merle m’amène à vous. Je vis à Champlain le long du fleuve et parfois je fais des promenades en longeant les terrains voisins. C’est le deuxième printemps qu’un merle mâle s’approche et marche quelques 20 pieds devant moi tout le long. Il est tellement beau que je lui parle et essaie de l’amadouer.
    Ce printemps, ça fait deux fois qu’un merle me frôle la tête en volant. Une fois je jasais avec la voisine. Nous avons sursauté et lui s’est posé sur une branche tout près. La seconde, je décapais un vieux meuble dans le garage la porte grande ouverte. Il est entré, m’a frôlé la tête et est reparti se poser sur une branche et m’a regardée. Ça m’a effrayée, mais peut-être qu’il ne veut pas m’effrayer… Veut-il plutôt attirer mon attention pour que je m’occupe de lui, comme pour l’apprivoiser? C’est peut-être naïf de ma part de penser ça.
    Merci et à bientôt. Anne Marie

    25 avril 2022
  8. Jean Provencher #

    Chère Anne Marie,

    S’il est en train de nicher avec une conjointe tout près, il peut faire cela pour vous éloigner. Les Hirondelles bicolores vont même jusqu’à donner en passant un coup de bec sur la tête de quelqu’un.

    Mais s’il n’est pas dans une relation de couple, moi, je ne m’inquièterais pas. Les merles ont un très beau chant l’été. Mais, à ce temps-ci, s’il trouve que vous êtes trop près, il y va d’un cri de quatre ou cinq coups, tous sur le même ton. Chez moi, celui que j’ai y est allé de ces cris, il y a une semaine, Et j’ai repris tout de suite les mêmes cris. Cela l’impatientait. Et il reprenait ce cri. Et moi je le reprenais. Mais, à un moment donné, il a changé de place, voyant que je ne cèderais pas.

    Essayez peut-être de vous amuser avec lui… un peu comme cela.

    25 avril 2022

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