Une maison hantée en pays acadien (premier de deux épisodes)
Sous le titre «Les revenants de Port-Royal», qu’on présente comme une légende acadienne, le quotidien montréalais La Patrie du 10 février 1888 propose la traduction d’un article du journal néo-écossais Halifax Herald.
Depuis longtemps — dit le correspondant — on me rapportait qu’une ancienne habitation de la route Clements, près d’Annapolis, était hantée, et qu’il s’y passait des choses, qu’on y voyait des apparitions qui faisaient dresser les cheveux sur la tête. Un homme, sans tête, portant l’uniforme du soldat français d’il y a un siècle et demi, marchait, me disait-on, dans une certaine chambre; une femme aveugle versait des larmes sur une chaise, puis un grand bel officier montait l’escalier, allait à la porte de la grande salle, revenait sur ses pas à la tête de l’escalier, et roulait de haut en bas avec un bruit épouvantable. Puis bien souvent on entendait des coups de pistolet. Tout cela arrivait toujours le même soir, une fois le mois, c’est-à-dire la quatrième jour. Je n’en croyais pas un mot, mais tout de même ces récits fantastiques me taquinaient énormément et un bon jour je résolus d’en avoir le cœur net.
Donc, le 4 décembre dernier (1887), déguisé en colporteur, je frappais à la porte de la maison soi-disant hantée et demandait à coucher pour la nuit, ce qui me fut accordé. Sous le prétexte d’être fatigué et de m’endormir, je demandai à me coucher. Mes hôtes se jetèrent un regard furtif. La femme murmura quelques mots à l’oreille de son mari; je ne surpris que ceci «la grand’chambre de devant».
Une minute après, je me trouvais dans cette chambre, mais j’étais loin de vouloir dormir. Je me déshabillai, baissé la lumière de ma lampe et me suis mis au lit. Il y avait bien deux heures que j’y étais et je commençais à me dire que je ne verrais rien, et que toutes les histoires que j’avais entendu raconter n’étaient que des racontars de vieilles femmes.
La porte que j’avais laissé entr’ouverte fut soudain légèrement poussée, et je commençais à devenir nerveux. J’étais tout yeux et tout oreilles. L’instant d’après, je vis une grosse forme s’avancer vers la lampe. Elle n’avait pas de tête; c’était donc le soldat sans tête que j’avais vu. Alors, je l’avoue, j’aurais donné mon dernier sou pour être loin de là. Mais je devais assister à toute la cérémonie. Il faisait noir et je tremblais de tout mon corps.
Cependant je pris mon courage à deux mains et j’allai rallumer la lampe, mais je revins au lit en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Après une attente assez longue et surtout peu agréable, mon attention se tourna à l’autre bout de la chambre, en face du pied de mon lit. Au lieu d’une vieille femme assise sur une chaise et pleurant, je vis la forme d’une jeune femme. Je ne pouvais lui voir le visage, mais ses habits étaient anciens et étranges. Elle y resta quelques minutes, et elle disparut comme une ombre. J’avais grand hâte qu’il fit jour et j’étais résolu de ne plus jamais rechercher les apparitions.
Le jour vint enfin et, dès que j’eus entendu le bruit des membres de la famille qui s’étaient levés, je descendis. Je mangeai bien peu au déjeuner. La maîtresse de la maison, voyant que j’étais pâle, me demandait si je n’avais pu dormir. Je lui racontai tout ce que j’avais vu. À son tour, elle me déclara que personne n’avait couché dans cette chambre depuis des années à cause de la réputation qu’elle avait d’être hantée.
Pour sa part, elle n’avait jamais vu les apparitions, mais elle était convaincue de leur existence, et, quelque temps auparavant, elle avait décidé que le premier étranger qui viendrait demander à couvert coucherait dans la chambre. Ces apparitions, me dit-elle, se rapportent à une bien étrange histoire qu’elle tenait de sa grand’mère, qui avait habité la maison longtemps avant elle.
Demain : la suite de l’histoire de la maison hantée de Port-Royal.
Il existe une histoire de cavalier sans tête au nord du lac,a ste jeanne d’arc pour etre plus précis.Des enfant aurait aperçu le spectre un soir d’hiver.
Personnellement, Monsieur Gaudreault, j’aime ces histoires étranges.