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De Satprem, un livre de sagesse

En son temps, j’ai beaucoup aimé Par le corps de la terre, un livre pour cheminant, un livre pour personne en marche, en quête d’elle-même au fond. Certains en riaient peut-être, je ne sais plus, mais d’autres l’ont trouvé fort utile.

Voici quelques extraits. C’est beaucoup réduire l’ouvrage qui compte 444 pages. Allez, une idée du ton. Le personnage est en quête de sagesse, vit des moments heureux, mais souvent aussi fort difficiles. La cuve à laver.

Tantôt il se réjouit, tantôt il désespère. Un peu, vraiment seulement un peu, comme dans le film d’Alejandro Jodorowsky, El Topo.

C’était un grand rite qui se passait, un infini retour des choses comme celui des oiseaux et des étoiles ; c’était simple comme la vérité, c’était sans tristesse comme la vérité ; c’était depuis toujours. […]

J’étais au point nul : rien devant, rien derrière. On aurait dit que ce moment-là revenait chaque fois dans ma vie, comme si je devais passer et repasser par le même point, le même, toujours le même, mais chaque fois plus douloureux, plus aigu — on dirait qu’on passe sa vie à tourner autour d’un certain point, et si l’on connaissait vraiment le point, on aurait résolu le problème, tranché le cou du destin. […]

Le but était partout ! À chaque instant, c’était le but, totalement le but, en chaque point de l’espace, chaque seconde du temps, sans un hiatus d’avenir pour espérer, sans une faille de passé pour un regret ; c’était ça et tout le temps ça, parfaitement ça, à chaque seconde — une myriade d’orbites impérissables qui passaient et repassaient par d’éternelles coordonnées, un seul mouvement imprescriptible qui rattachait ce point de douleur, cet éclat de moi, ce tressaillement d’un âge, au passage de l’écureuil et au souffle des moussons, à cette chanson d’enfant sur une petite plage blanche, à d’innombrables chansons, d’infinis points de douleur ou de joie qui se fondaient ensemble, qui ne faisaient plus qu’une seule grande traîne lumineuse, une immense robe de neige tissée d’un millier de fils, et comme une grandiose unique Personne qui se mouvait par d’éternels champs d’azur. C’était la cérémonie des mondes — absolue, sans défaut, pour la seule joie d’elle-même. […]

La vie amène lentement nos rêves comme les oiseaux… […]

En route. […]

Il est une image éternelle derrière nous, et parfois elle émerge. […]

Va et regarde chaque chose comme un secret. […]

Peut-être les ombres nous talonnent-elles pour nous obliger à plus de lumière ? […]

Et je me demande si le futur que nous découvrons pas à pas n’est pas un vieux passé : une semence éternelle se déroule. C’était soudain comme les morceaux d’un puzzle qui tombent en place et forment une image complète : des scènes vues ici et là, incohérentes, sans lien, quelquefois même à des années de distance, venaient se rassembler d’un coup et me donnait la clef de l’histoire. Et il me semble bien que chacun de nous doit avoir sa clef.

 

Satprem, Par le corps de la terre ou Le Sannyasin, Paris, Éditions Robert Laffont, 1974. L’édition originale avait été publiée une année auparavant à Auroville, en Inde, aux Éditions Auropress. Laffont détenait les droits pour la France, l’Europe, les États-Unis, le Canada et le Japon.

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