Le grand Henry David Thoreau, sur les étoiles
Le voilà en excursion en forêt avec quelques amis. Nous sommes la nuit.
[…] C’était émouvant d’entendre le vent mugir par intermittences sur les rochers quand nous nous sommes réveillés, car il faisait assez froid et venteux. Au milieu de tous ces éléments, la nuit était d’une simplicité majestueuse dans cet endroit balayé par le vent : un magnifique clair de lune et une brise pénétrante. À aucun moment, il n’a fait plus sombre qu’au crépuscule à l’intérieur de la tente et nous pouvions voir facilement la lune à travers le toit transparent quand nous étions couchés, car il y avait la lune au-dessus de nous, avec Jupiter et Saturne de chaque côté dominant le Wachusett et c’était une satisfaction de savoir qu’ils étaient nos compagnons de voyage, si éloignés et hors de portée de notre destinée.
Manifestement, les étoiles ont été données comme consolation à l’homme. Sachant que nous étions condamnés à toujours ramper, il ne nous était pas moins permis de les contempler et nul doute qu’elles méritent un noble destin. Nous voyons des lois qui n’ont jamais failli, dont nous n’avons jamais conçu l’échec, et leurs lampes brûlent elles aussi de nuit comme de jour — la nature est si riche et si prodigue qui peut se permettre cette lumière superflue. […]
Henry David Thoreau, Les forêts du Maine, suivi de Une excursion au Wachusett et La succession des arbres en forêts, Paris, Éditions Payot et Rivage, 2018, p. 176s. Traduit de l’anglais et présenté par Thierry Gillybœuf.