En 1860, le poète Louis Fréchette vient d’avoir 20 ans et se fait les dents
Il en est à ses tout premiers poèmes. Voici le sixième :
Le premier baiser
Te souvient-il, mon adorée,
De cette heure d’épanchement
Où ta chevelure dorée
Vint effleurer mon front brûlant,
Où ma lèvre, chère Alvinie,
Sur ta lèvre alla se poser ?…
O moment d’ivresse infinie,
Que celui d’un premier baiser !
Alors as-tu lu dans mon âme
Tout l’amour qui la consumait ?
As-tu senti l’ardente flamme
Qu’en mon cœur ton œil allumait,
Quand ta bouche, mon Alvinie,
Enfin n’osa me refuser…
O moment d’ivresse infinie,
Que celui du premier baiser !
Quand dans ma mémoire infidèle
Les souvenirs se faneront,
Celui-là restera, ma belle,
Quand tous les autres passeront !
Oh ! non ! jamais, tendre Alvinie,
Le temps ne pourra l’effacer,
Ce moment d’ivresse infini,
Où j’obtins ton premier baiser !
Avril 1860.
Louis-Honoré Fréchette, Mes loisirs, Poésies, Québec, typographie de Léger Brousseau, rue Buade, 1863, p. 191s.