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Antonio Porchia a vécu toute sa vie habité par les mots

Né en Calabre dans le sud-ouest de l’Italie, Porchia (1885-1968) est déménagé en Argentine avec sa famille, à l’âge de 17 ans, au décès de son père. Soutien de famille, il fut journalier, puis imprimeur à Buenos Aires.

Et, comme il est écrit dans le deuxième de couverture de son grand ouvrage, il élabora durant des décennies, dans un travail de pensée incessant, de brèves sentences qu’il appellera ses Voix. Éditée tardivement à compte d’auteur, son œuvre fut longtemps  « involontairement secrète » diffusé dans le réseau des bibliothèques rurales de son pays.

Son travail fut découvert par l’écrivain et amant des pierres français Roger Caillois, que nous évoquons souvent sur ce site, qui en a traduit une partie publiée en France dès 1949.

Porchia fut aimé non seulement de Caillois, mais également de l’écrivain de prose et de poésie argentin Jorge Luis Borges (1899-1986), du poète argentin majeur Roberto Juarroz (1925-1995), et de l’écrivain français François Bott, qui échangerait volontiers, dit-il, contre ces lignes, « tout ce que j’ai écrit ».

Ici, nous vous avons déjà présenté deux billets des aphorismes de Porchia, un premier le 3 mars 2018 et un second le 28 mars 2018. En voici maintenant un troisième. À lire dans le silence ou une musique très douce, sous la lampe, bien lentement, espérant aucun dérangement.

Quand je mourrai, je ne me verrai pas mourir, pour la première fois.

Toute chose existe par le vide qui l’entoure.

Ce que je t’ai donné, je le sais. Ce que tu as reçu, je ne le sais pas.

Je suis un habitant, mais d’où ?

Les ombres : les unes cachent, les autres dévoilent.

L’homme, quand il n’est pas un automate, ne fonctionne pas bien.

Moi je ne suis pas comme toi. Mais si toi non plus tu n’es pas comme toi, alors moi je suis comme toi.

Ne pas faire usage de défauts, cela signifie ne pas en avoir.

Ont pouvoir sur moi, plus que tous les infinis, mes trois ou quatre habitudes innocentes.

Parfois je rêve que je suis éveillé. Et c’est ainsi que je rêve le rêve de mon rêve.

Depuis que je suis seul à savoir ce qui m’arrive, il ne m’arrive rien.

Quand il me semble que tout est sans moi, comme tout me semble extraordinaire.

Mes particules de temps jouent avec l’éternité.

Le soleil est l’extérieur de toutes les nuits et de tous les froids.

Le mystère t’a fait grand : il t’a fait mystère.

Je n’ai encore goûté aucun vin supérieur à mon sang.

Au dernier instant, toute ma vie durera un instant.

Quand il ne me restera plus rien, je ne demanderai rien de plus.

Les difficultés aussi passent, comme tout passe, sans difficulté.

 

Antonio Porchia, Voix réunies, Toulouse, Éditions érès, 2013. Collection PO&PSY in extenso. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Danièle Fougeras, dessins de Martine Cazin.

Simplement un mot pour dire que je ne « compose » pas de photographies, je prends ce qui m’est donné. Cette feuille vient d’un de mes grands peupliers faux trembles tombée là portée par quelque vent.

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