La chandelle à l’eau
Le soir, dès que la noirceur est venue, la chandelle, qui reposait avec les mouchettes sur la tablette de la cheminée, descend et s’allume. C’est à sa lumière qu’on veille.
Les coins de la cuisine restent sombres, on distingue à peine les poutres du plafond, et, s’il entre un étranger, il faut, pour le connaître, porter la chandelle jusqu’à lui ; mais, autour de la table, près de la petite flamme, on y voit assez clair pour tricoter, pour coudre, pour lire une vieille histoire dans un vieux livre…
S’il faut, dans la nuit noire, aller dehors pour donner à boire aux chevaux, c’est la chandelle encore qui éclaire la route, qui découvre le puits et sa brimbale, qui montre la porte basse de l’écurie. Dans son fanal de fer-blanc troué, elle brille et se rit du vent…
Depuis lors, il y a eu les bougies, les lampes, les becs de gaz, les lumières électriques…
Mais je pense toujours avec douceur au temps heureux où — plonge ici ! plonge là ! — je fabriquais de la chandelle à l’eau.
Adiutor Rivard, Chez nos gens, Montréal, Bibliothèque de l’Action française, 1923, 23s. Ouvrage couronné par l’Académie française.