L’immense «réseau internet» du monde végétal
Sous nos pieds, nous l’ignorons, se trouve un véritable réseau de communication, une autoroute d’informations et d’échanges avec à sa base le monde des champignons et leurs attaches, le mycélium.
Environ 100 000 espèces de champignons ont été décrites à ce jour et on pense que le nombre total s’approcherait de cinq millions.
Sur ce site même, vous trouverez, dans la section «Catégories», à droite, un monde que nous appelons «Les portes», contenant de nombreux billets. Cette catégorie porte sur les interactions entre les êtres vivants auxquelles nous ne portons à peu près jamais attention.
Je l’écrivais, nous sommes quelques-uns dans la région de Québec à réfléchir à ce bien large monde de «langages», de couleurs, de comportements, à chercher à lever un coin du voile. Un peu de déstabilisation dans un monde qui conforte ne peut que garder vivant.
Mon ami Simon Hains m’est très précieux. Comme mon fils, il déniche des trouvailles. Voilà qu’il m’envoie maintenant ce billet de la BBC présenté par Nic Fleming : Plants talk to each other using an internet of fungus.
Si vous lisez l’anglais, autant alors me court-circuiter, passer par la voie rapide, y aller directement. Sinon, voici quelques constats.
Tout à fait en votre absence, un des arbres de votre jardin est peut-être lié à un buisson à plusieurs mètres de distance grâce au mycélium, cet ensemble de filaments à la base des échanges. Les plantes ne sont pas là seulement à croître en silence. Elles peuvent aider des voisins en échangeant des nutriments et de l’information, ou encore s’en prendre à d’autres plantes qui ne sont pas bienvenues dans le réseau.
À l’université de la Colombie britannique, Suzanne Simard a découvert que des grands arbres prêtent assistance à de petits, plus jeunes. Des semis à l’ombre, par exemple, à court de nourriture, reçoivent davantage de carbone de la part des arbres donneurs. En 2011, dans un documentaire portant sur le thème de la communication chez les arbres, Simard affirme qu’il y a entraide entre eux pour la survivance de chacun. «Ces plantes ne sont pas vraiment des individus au sens où l’entendait Darwin, lorsqu’il parlait de lutte pour le vie où l’emportait le plus fort.»
Ren Sen Zeng et ses collègues, de la South China Agricultural University de Guanzhou, ont montré que, lorsque des plantes sont attachées à des filaments préjudiciables, elles émettent dans le mycélium des signaux chimiques prévenant les voisins.
On a découvert aussi des pilleurs dans ce réseau fongique. L’Orchidée fantôme, par exemple, qui n’a pas de chlorophylle et ne peut produire sa propre énergie grâce à la photosynthèse, prend le carbone dont elle a besoin dans les arbres qui l’environnent par la voie du mycélium.
À la vérité, les échanges sont si nombreux dans ce monde que plusieurs biologistes en sont venus à le qualifier de «wood wide web».
«On n’y pense pas, affirme l’écologiste chimiste Kathryn Morris, car nous vivons au-dessus du sol, alors que la vie de la plupart des plantes que nous voyons se déroule dans le sol même, non pas grâce à leurs racines d’abord, mais aux liens fournis par le mycélium.»
Ce réseau illustre une des grandes leçons de l’écologie à l’effet que des organismes que nous croyons séparés les uns des autres sont souvent liés et peuvent dépendre les uns des autres. «The wood wide web seems to be a crucial part of how these connections form.»
Après cet article, mon ami Simon m’a fait suivre celui-ci du journaliste Michael Pollan, The intelligent Plant. Scientists debate a new way of understanding flora, publié sur le site du New Yorker, le 23 décembre 2013.
Merci encore, cher Simon.
On parle d’aller sur Mars alors que cette planète recèle encore tant et tant de mystères que nous découvrons à peine ! Merci de ce partage merveilleux…
Me semble qu’on pourrait s’étendre dans l’herbe, se coller l’oreille au sol et s’imaginer les écouter communiquer… Comme ça, on se sentirait un peu moins importants et dominateurs de la nature…
Tout à fait, tout à fait.