Gens des villes enfumées, qu’attendez-vous pour venir vivre à Rimouski ?
Extrait des «Lettres du bas du fleuve» de celui qui signe Frontenac [Charles Thibault]. Celle-ci fut écrite en juillet 1883 et L’Étendard (Montréal) la publie le 7 août 1883.
Quelle douce brise ! ô que je vous plains, gens de la ville, pendant ces longs jours d’été, brûlés que vous êtes, sans fraîcheur, sans ombre, sans repos. Ici tout est riant; la campagne est magnifique, les montagnes verdoyantes, les vents toujours frais; la mer d’ordinaire sereine vient mollement caresser le rivage.
Chaque vague nous apporte, en même temps qu’une harmonie nouvelle, une odeur de salin qui d’abord vous entête, mais qui bientôt vous endort comme un arôme soporifique des jardins de l’Orient !
Quels mystères au fond de ces masses d’eau salée, qui vont et reviennent toujours, d’après les grandes lois de l’attraction, sans jamais s’arrêter, sans jamais dévier ! Oui, Rimouski offre bien des charmes, des variétés, des fleurs, des fruits, des jardins, des montagnes, des plaines, et, pardessus tout, la vue de ce fleuve grandiose, enchanteur et aimé.
Ici tout est vie : point de menaces de choléra comme en Afrique, point de guerre comme en Asie, point de coup de soleil comme à New-York ou à Montréal. Point de grève télégraphique. Tout se meut dans la paix, dans l’ordre et dans l’harmonie.
Le bruit des batailles entre les Sénécalistes et les Castors ne nous empêche pas de dormir ! Nos grands hommes ne se laissent pas mourir comme les grands généraux américains : Grant et Tom Pouce !
Ah ! citadins, laissez-là vos somptueuses demeures où vous étouffez, pour venir respirer à pleins poumons le frais du bas du fleuve. Venez camper dans une chaumière ou sous une tente, venez, grands écoliers de la nature, admirer toutes les beautés qu’elle a mises à votre disposition, venez :
«Il est si doux d’errer sur un rivage,
De suivre, le matin, la lisière des bois,
Et d’écouter longtemps la musique sauvage,
Des vagues et des pins qui chantent à la fois;
De contempler, du bord, le calme et la tourmente,
Et, promeneur perdu dont nul ne se souvient,
De voir, sur une mer orageuse ou dormante,
La voile du vaisseau qui part ou qui revient.
De n’avoir pour amis que les divins poètes,
Qui vous chantent tout bas leurs vers mélodieux,
Et pour enivrements, et pour unique fête,
Que les songes dorés qui descendent des cieux !»
La photographie aérienne de la ville de Rimouski en 1931 apparaît sur la page Wikipédia qu’on lui consacre.