Retour sur ma Mouffette
J’y reviens, car, depuis six jours, vous êtes déjà 150 personnes à avoir lu mon histoire d’amour avec ma Mouffette de passage.
Les scientifiques d’aujourd’hui, lorsqu’ils causent bêtes, sont très sérieux, quasi sévères. Leurs connaissances nous sont fort précieuses, mais il n’y a à peu près jamais place à l’émotion.
Claude Mélançon, lui, naturaliste du milieu du 20e siècle, cherchait la simplicité pour faire comprendre, n’hésitant pas, à l’occasion, à émouvoir. Voilà pourquoi, j’ai tous ces livres. Il m’en manquait un, Nos animaux chez eux, publié à Montréal en 1953, que mon bouquiniste Bernard vient de me trouver à l’instant même.
J’avais si hâte de lire ce qu’écrivait Mélançon sur la Mouffette (Mephitis mephitis, Striped Skunk). Et voilà — ô bonheur — qu’il me donne raison. La Mouffette peut être une amie.
Après avoir dit que son nom vulgaire est Bête puante, et qu’en anglais, on l’appelle Skunk, Polecat et Alaska Sable, il écrit :
«La Mouffette est particulière à l’Amérique. Inoffensive, elle ne demande qu’à chasser en paix guêpes, sauterelles et petits rongeurs, ses proies ordinaires; mais si elle se croit attaquée, elle se défend, et avec quel succès ! […]
«Il est juste de dire que la Mouffette pousse l’amour de la paix jusqu’à prévenir trois fois avant de tirer. La première fois, elle frappe du pied sur le sol; la seconde, elle lève la queue, le bout étalé en parasol; enfin, elle érige le bout de la queue. En se figeant sur place et en lui parlant doucement, un homme peut encore prévenir les hostilités; mais s’il fait le geste d’avancer, la Mouffette ouvre le feu et foudroie l’adversaire à la première décharge. […]
«Elle aime le voisinage de l’homme, ce qui n’est pas toujours réciproque, et malgré ses larcins d’œufs et de poules, elle est très utile aux cultivateurs. Chaque année, elle détruit des milliers d’insectes nuisibles. Plusieurs états des États-Unis la protègent.
«Sous notre climat, les Mouffettes sont des hibernantes et dorment pendant les grands froids, souvent plusieurs ensemble, dans un de leurs trous ou dans le terrier d’une Marmotte expropriée. La femelle élève seule de deux à seize petits. Le mâle ne rejoint sa famille qu’à l’automne. Au Canada, on élève la Mouffette pour sa fourrure qui est fort belle.
«Le cris appelaient la Mouffette Chi-gak, d’où Chicago : terre des bêtes puantes. Tous nos Indiens étaient friands de sa chair, très délicate, paraît-il. Nos premiers missionnaires l’appelaient enfant du diable, à cause de son odeur infernale.
«Sa fourrure, comme celle du Castor, servait autrefois de monnaie. Son liquide méphitique, remède des anciens contre l’asthme et la coqueluche, est encore employé en pharmacie.»
La fourrure de la mouffette fut portée voilà une centaine d’années.
Et mes amis disquaires, Paul et Denis, qui rient de moi. «Tu peux bien être célibataire, me disent-ils, tomber en amour avec une Mouffette.»
Salut Jean.
Je t’ai quitté, il y a à peine une heure, tu me parlais de tes Amours oh combien méphitiques et joyeuses, mais moi au retour de ma course salutaire j’ai cru comprendre que je devais m’asperger d’Aqua Velva pour ne pas être un sujet de thèse aussi intéressant que ton amie la sémillante mustélidée.
Je crois que ce bel animal devrait être mieux considéré par le genre humain. Très utile et discret, les vaniteux de la politique devrait suivre son exemple et profiter de ses moeurs pacifiques; l’efficacité dans la démarche, la vérité de ce qu’il peut réaliser quand il trépigne pour nous avertir que les bonbons promis sont plus amers qu’ils ne semblent.
Tellement intéressant qu’on en veut plus. Merci
Comment te remercier, cher Daniel !!!