Et qui est donc cette petite qui vient se loger sur le bout de mon doigt, alors que je suis assis sur une des marches de la galerie ?
Est-ce que tu sais qui je suis ?
Toi, est-ce que tu as une mémoire ? Sans doute. Il n’y a pas de vivant qui vient à la vie sans une mémoire.
Tu sais quoi ? Mes livres me disent que tu serais peut-être la chenille de la Petite vanesse, au long nom scientifique Aglais milberti milberti. Tu as un nom plus compliqué que le mien. Ce sont les gens comme moi qui t’ont donné ce nom. Mais, toi, tu fais bien de ne pas te soucier de ce nom, de simplement vivre ta vie. Et si tu deviens Petite vanesse, tu seras peut-être une grande voyageuse. Tu appartiendras à une famille de grandes voyageuses et de grands voyageurs.
Et si tu es jolie maintenant, tu seras magnifique dans ta robe de Petite vanesse. Il y a même un entomologiste québécois, Louis Handfield, qui écrit que la Petite vanesse est sûrement l’un de nos plus beaux papillons diurnes. Tu vois ça !
Est-ce que tu parles ? J’aimerais beaucoup que tu parles. Oui, je comprends, tu te trouves à me parler en te promenant ainsi sur le bout de mes doigts.
Tu es légère, ça ne me chatouille même pas.
Et tu es curieuse, dis donc.
Tu es adorable. Tu es unique. Jamais les petites chenilles comme toi ont envie de rencontrer un humain. Merci.