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Pour qui a un peu vécu

Voyez ce texte de l’écrivain et enseignant Roland Bourneuf dans son ouvrage qui vient tout juste de paraître, Vieillir chemin de vérité, texte qui saura peut-être vous toucher.

« Une faible incitation réveille le passé. Une photo dans un album que je feuillette. Mon père dans son jardin, ma mère sur le pas de la porte, mes deux fils en train de jouer, leur mère toute jeune, des amis d’un jour vite perdus de vue ou ceux de toute une vie. Jeanne et notre premier voyage, Paris, l’Auvergne, les îles Borromées. Une rencontre fortuite, une échappée dans la forêt au détour d’un chemin, un son de cloche, un parfum d’œillets, une saveur, telle la madeleine proustienne dans la tasse de thé : voilà ressuscitée une émotion de l’enfance, comme le fait la sonate de Vinteuil. La musique bien sûr, quelques mesures de Mozart ou de Schubert, un passage de Brahms, de Sibelius ou de Bruckner, une pièce d’Arvo Pärt. Une chanson des années cinquante, le timbre de voix d’Aznavour, de Reggiani ou de Barbara. La musique de Nino Rota pour les films de Fellini. D’autres films, en nombre, Le Guépard, Amarcord, Les 400 coups et les premiers Truffaut. Et la littérature ! Les vastes sagas, Les Thibault, La guerre et la paix, Gaspard des montagnes, Baudelaire, toute la poésie symboliste, Hölderlin et Goethe… Que sais-je encore ? Je n’ai pas mentionné encore la peinture, de Léonard de Vinci à Friedrich ou à Monet.

« La liste pourrait être longue, interminable, impossible à établir. Tout ce qui un jour fut une découverte, du nouveau et qui revient éveiller, intacte, mon émotion parfois me bouleverse aux larmes. Tout ce que je garde comme un trésor intime. »

Roland Bourneuf, Vieillir chemin de vérité, Montréal et Paris, Médiaspaul, 2020, p. 37s.

 

À la vérité, chacune-chacun d’entre nous pourrait dresser une pareille liste, qui lui serait propre. J’imagine une grande rencontre de cinq, six, dix camarades qui partageraient avec les autres un peu de leur trésor intime.

Sur la photographie en majeur, prise en 1923, probablement rue des Volontaires, à Trois-Rivières, on aperçoit à gauche mon grand-père Rodolphe et sa seconde épouse, Médelle Perreault, avec quatre de ses dix enfants, les plus jeunes, Jeanne, André, Monique et mon père Jean-Marie, âgé de neuf ans, assis sur l’aile de la voiture. À l’arrière de l’image, apparaît le nom d’une inconnue pour moi, Thérèse Brunelle, peut-être la photographe.

La seconde photographie, de moi-même, fut prise à Normanville en 1952, et c’est à mon tour d’avoir neuf ans. Ce quartier de Trois-Rivières, encore fort peu occupé, connaîtra par la suite un développement important.

La troisième est celle de l’un de mes petits-fils dont c’est à son tour, sur cette image, d’avoir neuf ans.

2 commentaires Publier un commentaire
  1. Mariette Provencher #

    Quelle belle page de ton blogue, Jean. J’ai un souvenir vague d’avoir déjà vu la photo de grand-papa Rodolphe et de la plus grande partie de sa famille. Ça fait sourire de penser que Raoul, Roger, Laurette et Simone avaient, dans ce temps-la comme les ados d’aujourd’hui, trouvé mieux à faire qu’immortaliser une scène familiale.

    7 février 2020
  2. Jean Provencher #

    Merci beaucoup, chère.

    7 février 2020

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