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Je suis fort heureux que la maison d’édition Mémoire d’encrier ait publié certains textes de l’écrivaine, journaliste et collaboratrice au quotidien Le Devoir, Monique Durand

Cette dame, à la plume fort riche pour décrire le quotidien, est éprise de notre grand fleuve, en particulier de l’estuaire et du golfe, et des terres intérieures qui s’y trouvent.

Elle est même allée virer à l’Anse-à-Canards, à Terre-Neuve, pour pouvoir nous parler d’Émile Benoit. Extrait.

Il arrive que nous visitions un pays pour une seule chanson aimée, vénérée, qui, nous semble-t-il, contient ce pays tout entier dans ses quelques notes et paroles. J’en connais qui se rendirent en Irlande juste pour Oh Danny Boy. À Paimpol, juste pour La Paimpolaise. À Natashquan, juste pour Jack Monoloy. C’est ainsi que je me suis rendue à l’Anse-à-Canards, sur l’île de Terre-Neuve, pour Vive la rose et Émile Benoit qui en fut le plus inoubliable interprète. À quelle contrée appartenait-il pour nous bouleverser ainsi avec le refrain d’une amante éconduite O gué vive la rose /Vive la rose et le lilas ? D’où venait donc cet homme à la voix chavirante qui faisait se retourner les pierres ? […]

Vive la rose, interprétée par ce Franco-Terre-Neuvien, c’est une complainte belle jusqu’à l’insoutenable pour certains cœurs trop fragiles, c’est toute la mélancolie du monde chantée avec la voix chevrotante d’un homme sur le déclin de sa vie, et les mots français escamotés de celui qui était allé seulement trois ans à l’école, et à l’école anglaise. Car, à Terre-Neuve, le français était alors une langue proscrite en dehors de la maison. […]

Il dut attendre la fin de sa vie de pêcheur et le début de la soixantaine pour que ce don s’épanouisse pleinement. Son exceptionnel talent, doublé d’une personnalité haute en couleur et prompte aux réjouissances, le porta bientôt jusqu’en France, en Angleterre, en Norvège, à la Nouvelle-Orléans. On lui reconnaît la paternité d’au moins 200 compositions musicales ou chansons, en français et en anglais. L’on peut dire que Vive la rose est à Émile Benoit de Terre-Neuve ce que Mon Pays est à Gilles Vigneault du Québec. […]

 

Merci, cher Éric, pour ce livre.

Monique Durand, Saint-Laurent mon amour, Montréal, Mémoire d’encrier, 2017, p. 141-143.

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