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En Russie, dans le monde des superstitions

superstitions russesPropos bien étonnants.

C’est grâce à la croyance populaire dans les esprits malins que les divinations de tous les genres sont tellement en vogue parmi nos paysans. Elles ont acquis sur eux une telle influence que les jeunes filles du peuple croient fermement que ce sont leurs «prédestinés» qui leur apparaissent sous forme de visions, soit dans un miroir, soit dans la maison de bain.

Ces divinations ont lieu, le plus souvent, à la veille du Nouvel An.

Habituellement, le «prédestiné» apparaît à chaque jeune fille sous le masque du diable; aussi croient-elles devoir cacher à leur mari de les avoir jamais vus sous cet aspect avant le mariage. Ces derniers s’offenseraient, en effet, à l’idée d’avoir été évoqués par leurs femmes, celles-ci ayant dû savoir qu’ils leur apparaîtraient nécessairement sous la forme de l’esprit malin !

Les formes de divination les plus usitées chez nous sont les suivantes :

On pose sur une table, l’un en face de l’autre, deux miroirs pareils, s’il se peut, de grandeur et de forme. On entoure chacun d’eux de 4 bougies; l’image vue à la réflexion de ces lumières produit l’illusion d’un corridor, vivement éclairé, qui pourrait être pris pour une enfilade de chambres.

Sur le coup de minuit, celle, qui a eu la curiosité de vouloir deviner son sort, se met en face de l’un ou de l’autre des deux miroirs, mais de manière à voir s’y refléter celui d’en face avec ses quatre bougies. Si l’heure avancée, le silence et la solitude n’impressionnaient pas son imagination, elle n’y verrait probablement rien. Dans le cas contraire, elle doit s’attendre à y apercevoir quelque chose, qui aurait trait à son avenir; elle pourrait donc y voir son futur mari, si le sort voulait son mariage. Si elle devait mourir dans l’année, elle apercevrait un cercueil.

Devant se marier prochainement, elle verra un homme entrer, traverser toute l’enfilade de chambres, fermer la porte de la dernière et s’asseoir à une table à côté d’elle-même. La vision arrivée à ce point, elle doit, sans perte de temps, se lever, éteindre les bougies et retourner hâtivement les miroirs, car, si elle continuait à y regarder, elle risquerait d’avoir le cou dévié par le mauvais esprit, en punition de son extrême curiosité.

D’autres fois sur le coup de minuit, quelque courageuse jeune fille se risque d’aller dans la maison de bain [assurément un bain public], généralement située à l’extrémité du village, et elle s’assied à une table munie de deux couverts.

Si elle devait se marier dans le courant de l’année, son «futur» ne tarderait pas à l’y rejoindre. Mais dès qu’elle le verra s’asseoir auprès d’elle, elle devra s’empresser de quitter sa chaise aussi bien que la maison même.

Quelques-unes des jeunes filles courent aussi à la maison de bain, se contentant d’étendre leur main par une fenêtre pour se la faire toucher. Si la jeune fille se sentait effleurée par une main velue, cela signifie que son «futur» sera riche; si, au contraire, c’est une maison sèche et maigre qui saisit la sienne, cela veut dire que le «prédestiné» sera ou pauvre ou avare, de sorte que, dans tous les cas, elle ne sera pas heureuse.

Des faits semblables s’observent un peu partout, et il n’y a, à cet égard, entre la Russie et les nations occidentales, qu’une différence de quantité, plutôt que de qualité.

 

Le Canada français (Saint-Jean-sur-Richelieu), 21 septembre 1893.

Il faut comprendre qu’à la fin du 19e siècle, grâce au télégraphe, les journaux peuvent rapidement s’approvisionner de textes provenant de l’étranger. Celui-ci est paru d’abord dans Vie contemporaine, une publication parisienne.

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