On ne peut jamais prévoir les méfaits de la foudre
On le rappelait, il y a une semaine. La voici à Trois-Rivières maintenant.
Durant la forte tempête de samedi, la foudre est tombée sur une petite maison en bois située à l’extrémité de la rue Notre-Dame, à peu de distance du moulin à vent.
Cette maison était occupée par un journalier du nom de Israël Plouf, qui l’habitait depuis plusieurs années. Au moment de l’accident, il y avait dans la maison le père, la mère, sept enfants et un voisin du nom d’Adrien Lacombe qui causait tranquillement avec M. Plouf, près de la porte.
La foudre se fit une issue près de la cheminée, enlevant une grande partie de la boiserie du dehors, lançant les planches à une distance de près de trente pieds [9,2 mètres]; la cheminée fut à moitié démolie, le poêle fut démonté complètement et les plaques dispersées en divers endroits dans la maison.
Madame Plouf, qui se trouvait dans le moment appuyée sur le poêle, fut tellement ébranlée par le choc qu’elle sortit de la maison affolée de terreur en poussant des cris épouvantables.
Chose digne de remarque, elle ne fut aucunement atteinte par les morceaux du poêle; la pauvre femme cependant est restée complètement sourde; on le deviendrait à moins, assurément. Une théière qui se trouvait sur le poêle fut lancée de l’autre côté de la rue avec une violence peu commune.
La cheminée en tombant couvrit de briques et de mortier le plancher; par un heureux hasard cependant, un enfant de six semaines qui dormait paisiblement à quelques pieds du poêle et de la cheminée ne reçut aucune contusion, malgré que le berceau fut entouré de toutes parts par des briques et des débris de planches.
Madame Plouf en racontant l’accident dit qu’elle aperçut tout à coup une épaisse fumée et que ce fut tout; c’est alors qu’elle se précipita en dehors de la maison en poussant des cris et en proie au plus grand désespoir.
Au dehors, des briques de la cheminée ont été lancées à une distance de près de cinquante pieds. Samedi soir et hier durant l’après-midi, une foule nombreuse s’est rendue sur les lieux de l’accident.
L’étonnement est général quand on songe que, sur le nombre de personnes présentes dans cette petite maison, aucune n’a été blessée si ce n’est cependant la pauvre mère frappée de surdité.
Le spectacle de cette pauvre famille jetée sur le pavé par suite de cet accident était des plus navrants.
Il est à espérer que la corporation de cette ville, à qui appartient cette maison, se hâtera de la faire réparer d’une manière qui permettra à cette pauvre famille de l’habiter de nouveau.
La Patrie (Montréal), 27 juillet 1882.