La voix de l’Église
Rappel à l’ordre du cardinal américain James Gibbons (1834-1921).
Les citadins huppés, qui passent l’été à Southampton (Long Island), se sont émus d’un sermon prêché dimanche dans l’église catholique de l’endroit par son Éminence le cardinal Gibbons, chef reconnu de l’Église américaine.
Il y a quelques mois, les autorités de l’Université catholique de Washington annoncèrent la fondation d’un collège de femmes à l’université, et les féministes américains s’empressèrent d’en conclure que dans les hautes sphères du catholicisme on avait embrassé leur programme.
Le sermon de dimanche dernier, prononcé, comme à dessein, devant un auditoire de beaux messieurs et de grandes dames, de toute croyance religieuse, mais presque tous épris d’un féminisme plus ou moins pratique, est venu fort à propos jeter un peu d’eau froide sur cet enthousiasme excessif.
«Le Saint-Esprit, a dit son Éminence, rend dans l’ancien Testament un hommage magnifique et bien mérité à la femme et au rôle de la femme dans la société. Mais ce rôle, il le fait consister dans les travaux domestiques plutôt que dans une participation active aux luttes de ce monde. Qu’est-ce que le Saint-Esprit approuve chez la femme ? L’admire-t-il à cause de ses triomphes mondains, parce qu’elle s’y entend à conduire la société ? Parce qu’elle demande pour son sexe de prétendus privilèges ? Parce qu’elle va de place en place prêcher, du haut de la tribune publique, ce qu’elle appelle les droits de la femme ? Pas du tout.
«Le Saint-Esprit donne tout entière sa préférence à la femme aimante, à la mère affectionnée, à la ménagère consciencieuse et fidèle, qui répand dans sa maison le parfum de la vertu et ne mange pas ses viandes dans l’oisiveté; à la femme qui s’occupe des menus détails de la vie et les exécute avec un soin irréprochable.»
On dit qu’un certain nombre des auditeurs du distingué prélat ont trouvé cela «shocking». On n’a pas encore fini de parler du sermon de dimanche dernier, à Southampton.
La Patrie (Montréal), 21 août 1900.