Un nouveau serpent de mer, cette fois-ci dans l’estuaire du Saint-Laurent
Il y a un peu plus de cent ans, les mentions de serpents de mer abondent dans la presse québécoise, des bêtes se manifestant dans le nord-est de l’Amérique du Nord. Récemment, on en voyait un au lac Noir et, quelques jours plus tard, au lac William, à Saint-Ferdinand d’Halifax.
Cette fois-ci, l’un d’entre eux apparaît dans l’estuaire du fleuve Saint-Laurent.
Les nombreux touristes qui se trouvaient à La Malbaie, dimanche, ont été mis en émoi par la nouvelle qu’un monstre marin, probablement un serpent de mer, d’une centaine de pieds de longueur [30 mètres], avait été vu en dehors de la baie.
En un instant, la plage fut couverte de spectateurs et voici ce que l’on apprit.
Le Dr Dawson, de Toronto, M. McKnight et une autre personne, qui pensionnent tous trois à l’hôtel Duberger, traversaient de Kamouraska dans une petite goélette appelée l’Alouette, qu’ils avaient nolisée et qui appartient à M. Warren, de Québec.
Vers le milieu du fleuve, M. Dawson aperçut à une courte distance en avant du vaisseau une ligne noire sur les flots. Il appela ses compagnons, et tous trois purent facilement se rendre compte de la nature de l’apparition.
C’était tout simplement un énorme serpent de mer qui semblait dormir et dont les vagues faisaient onduler le corps. La couleur de la peau était roussâtre, et la tête était exactement celle d’un serpent. Le monstre paraissait avoir cent pieds environ de longueur et une couple de pieds de grosseur.
Comme on ne désirait nullement faire plus ample connaissance avec l’animal, on changea la direction du vaisseau, et le clapotis des voiles eut pour effet de faire lever la tête à l’habitant des mers.
Cette tête se souleva à une quinzaine de pieds dans les airs et, en se tournant vers les spectateurs terrifiés, elle fit entendre un court sifflement comme celui d’une locomotive. Puis elle plongea dans les flots et le monstre disparut.
Les trois touristes ont fait leur déclaration sous serment n présence du protonotaire du district, M. George Duberger. Un marin canadien-français, qui était à leur service et qui a aussi été témoin de la scène que nous venons de raconter, corrobore leur narration.
Cet article est publié dans L’Étendard, du 2 août 1883. Le journal montréalais dit qu’il reprend la nouvelle du quotidien de Québec, L’Événement.
* * *
En août 2011, mon bouquiniste Michel Roy, grâce à une de ses trouvailles, me fait découvrir les images qu’on peut obtenir de l’appareil photo, à prix populaire, inventé par l’Américain George Eastman en 1888. Michel venait de dénicher quelque part deux petits albums, contenant quelque 80 photographies en sépia.
L’image ci-haut est extraite d’un de ces albums. On y voit la «plage» en bordure du Saint-Laurent, au pied du manoir Richelieu à La Malbaie. Nous sommes durant les années 1890.