Un premier ministre québécois poète
Il est bien rare qu’un premier ministre québécois ait montré quelques talents pour la poésie. Cet homme avait même créé un ministère de l’Éducation 60 ans avec Jean Lesage, mais l’Église catholique veillait et il dut reculer. Son nom ? Félix-Gabriel Marchand. Un des grands premiers ministres du Québec.
À la une de son édition du 22 janvier 1884, Le Sorelois, publie un de ses poèmes. Le journal le re-publiera le 9 mai 1884, toujours à la une.
Chant du Batelier
Beau Richelieu, tes bords qui m’ont vu naître
Ont, pour mon âme, un attrait séduisant;
Un doux penchant dont mon cœur n’est pas maître,
M’attire auprès de ton flot mugissant.
Quand vient le soir, guidé par mon étoile,
J’aime à voguer sur ton immense lit;
Dans mon canot, sans gouvernail ni voile,
Je m’abandonne à ton onde qui fuit.
Parfois la lune, en perçant un nuage,
Porte sur l’eau son regard incertain….
Puis l’eau scintille…. et sa riante image….
Se réfléchit au fond de ton bassin
Sous les rameaux d’un orme centenaire,
Près de tes bords, au sein d’un pré fertile,
Je vois, au loin, le modeste profil
D’une blanche chaumière.
Allant au gré de l’onde et de mes vœux,
Ma nef, que pousse une occulte puissance,
Glisse, sans bruit, jusque près de ces lieux,
Discrets témoins des jeux de mon enfance.
C’est là que Rose, au début de nos jours,
Me recevait en chantant, dès l’aurore;
Aujourd’hui, belle et joyeuse toujours,
Sur son pré vert, elle m’attend encore….
Comme ton cours, doux et harmonieux,
S’écoule aussi le printemps de mon âge;
Mais ce présent si calme et si heureux
Pour l’avenir, me fait craindre l’orage !
La gravure ci-haut, Sur les bords de la Richelieu, par un beau soir d’été, est parue dans L’Album universel du 23 août 1902. On la retrouve aujourd’hui sur le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, au descripteur «Richelieu, Rivière (Richelieu, Québec)».