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Quelle beauté !

Au fil du temps, j’ai beaucoup observé le Jaseur des cèdres (Bombycilla cedrorum, Cedar Waxwing), ce fort bel oiseau. En particulier dans mon vieux verger. Car cet être de beauté m’arrive du Sud lorsque mes pommiers sont en fleur, pour se gaver de pétales.

Hier, par cette magnifique journée de solstice, alors que je marchais mon terrain, que vois-je ? Un couple de ces oiseaux, pas du tout dérangé par ma présence. Bientôt, ils y vont d’échanges amoureux. L’un d’eux tient dans son bec ce qui est sans doute un fruit qui s’apparente à une bille. Et longtemps, sans se lasser, ils se le passent de l’un à l’autre. Voilà que bientôt ils se frottent aussi le bec l’un contre l’autre, de même que les joues de chaque côté du visage. Quel spectacle !

Dans l’ouvrage Les oiseaux nicheurs du Québec, Atlas des oiseaux nicheurs du Québec méridional, sous la direction de Jean Gauthier et Yves Aubry (Montréal, 1994), les auteurs de l’article sur le Jaseur des cèdres, François Shaffer et Josée Tardif, écrivent : « L’observation de cette espèce révèle de nombreux comportements intéressants. L’un des plus originaux est sans doute l’échange de fruits entre partenaires, qui s’effectue tant lors de la formation des couples qu’au cours de l’incubation. Ce comportement généralement amorcé par le mâle qui sautille alors latéralement vers la femelle avec, dans le bec, un morceau de fruit ou une baie, qu’il lui offre. La femelle fait ensuite la même chose, puis c’est de nouveau le tour du mâle, et ainsi de suite jusqu’à ce que l’un ou l’autre décide de manger le fruit. À l’occasion, les oiseaux s’échangent également des pétales de fleurs. »

Dans Charmants Voisins (1940), le naturaliste Claude Melançon, qui ne peut cacher son amour pour cet oiseau, écrit : « C’est aussi pendant la pariade que le Récollet révèle la douceur et le charme de son caractère. Affectueux et tendre, il caresse sa compagne, lisse ses plumes, lui apporte des friandises et frotte son bec contre le sien. Pendant la construction du nid, ils bavardent ensemble et donnent le spectacle d’un petit couple uni par un sentiment fort et partagé. » Melançon dit que la huppe aussi relevée exprime le contentement chez le jaseur.

Si vous aimez les oiseaux, que ce spectacle vous soit donné un jour. Des ornithologues comme James M. LeMoine, Charles-Eusèbe Dionne, P. A. Taverner et William Earl Godfrey n’en parlent pas, signe peut-être qu’il faut être là au bon moment pour être témoin de cette manifestation de tendresse.

Au sujet de ces manières de faire chez le jaseur, l’écrivain et poète Pierre Morency, grand amant des oiseaux, mon ami, nuance cette interprétation dans son ouvrage L’œil américain (Montréal, Boréal, 1989) : « Ce comportement, fait de gentille prévenance, exerce une grande fascination sur l’imagination. Certaines personnes y ont vu la preuve que les qualités de savoir-vivre n’étaient pas tout à fait absentes chez les animaux. Qu’en sait-on au juste ? Les animaux respirent le même air que nous, mais font-ils vraiment partie de la même réalité ? En fait, il apparaît que les jaseurs, à l’époque de la formation des couples, échangent des cadeaux (il peut s’agir d’un insecte, d’un fruit, d’une fleur, d’une feuille) dans le seul but de se reconnaître. Mâles et femelles sont absolument identiques. Chez eux, aucune marque, aucun chant ne vient distinguer les sexes: on voit même parfois un oiseau venu se poser tout près d’un congénère pour lui offrir un cadeau se faire rabrouer de la manière la plus explicite: un mâle vient de courtiser un autre mâle ! Si l’oiseau accepte le présent pour ensuite le rendre, il se définit comme une femelle prête à accepter le mâle. »

Sur la dernière image, vraiment floue malheureusement, on voit un mâle offrant un pétale à un autre jaseur. Mais la vérification lui permet de constater qu’il s’agit d’un autre mâle, celui-ci refusant son cadeau.

echangeentrejaseurs

3 commentaires Publier un commentaire
  1. Henri Desmeules #

    Superbes photos !

    22 juin 2013
  2. Jean Provencher #

    Je fus soudain bien surpris de les apercevoir, et puis si content qu’ils demeurent un moment même avec ma présence.

    23 juin 2013

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  1. Ils sont entrés, les magnifiques ! | Les Quatre Saisons

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