Décès du Patriote François-Xavier Prieur (1814-1891)
De 1870 à 1900, même un peu après, à chaque fois que meurt un Patriote ayant participé aux événements de 1837-1838, plusieurs journaux québécois le saluent.
Le 14 février 1891, Paul Colonnier, dans les colonnes du Monde illustré, donne un coup de chapeau à François-Xavier Prieur à l’occasion de son départ. Prieur fut un des «Canadiens errants» condamnés à l’exil.
Nous publions cette semaine le portrait de M. F.-X. Prieur, l’un des derniers survivants des patriotes de 1837-38. Il faut lire les Notes d’un condamné politique écrites par lui-même, pour se rendre compte des grandes luttes qu’il a soutenues et des souffrances qu’il a endurées avec les siens pour la Liberté du pays.
M. Prieur est né le 8 mai 1814 à Saint-Polycarpe, où il était à la tête d’une florissante maison de commerce quand éclata la révolte. Il fut, dès les premiers temps, remarqué par sa bravoure et dirigea bientôt la lutte avec une grande énergie. Mais il dut céder, à Beauharnois, devant l’arrivée des troupes régulières qu’il ne peut contenir avec ses patriotes mal armés et dépourvus de tout.
Bientôt il fut fait prisonnier et, le 24 janvier 1839, cet homme, dont le crime avait été de vouloir sauver les siens, fut condamné, avec douze de ses compagnons, à subir la peine infligée aux criminels; cependant, il fut épargné et vit sa sentence commuée en un exil à perpétuité. Le 23 septembre suivant [les sources mentionnent aussi le 25 septembre et le 27 septembre], il fut embarqué à Québec avec huit de ses compagnons sur le Buffalo [ils étaient 58 Patriotes et non 8, sur ce bateau], partant pour l’Australie. Nul ne connaîtra jamais les souffrances infinies et les traitements barbares qu’éprouvèrent ces malheureux pendant cette épouvantable traversée.
Enfin, après sept ans d’exil, il put revenir vers les siens et contempler encore une fois ces rives chéries du Canada pour lesquelles il avait vécu, pour lesquelles il avait voulu mourir; Dieu sans doute avait voulu récompenser cet homme de cœur et lui faire oublier enfin les amertumes de son sacrifice.
Revenu au pays, M. Prieur se maria avec Mlle Neveu, qu’il avait connue pendant la guerre, alors que, toute petite fille encore, elle allait porter elle-même des vivres aux malheureux patriotes traqués dans les bois comme des bêtes féroces.
En 1860, Sir Geo. Cartier, dont M. Prieur était l’ami intime, lui offrit la charge de Préfet de l’École de réforme, à l’île aux Noix. Puis, en 1870, il fut nommé directeur à Ottawa des Pénitenciers de la Puissance. En 1876, madame Prieur mourut, et lui-même vint s’établir à Montréal, où il s’est doucement éteint le 1er courant.
Il avait exprimé le désir avant de mourir que les fils de ses deux plus chers compagnons de chaînes, MM. Laberge et Lepailleur, fussent présents à ses funérailles et portassent les coins du poële. Ce désir fut religieusement exécuté; pensée touchante de cet homme de cœur qui voulut être accompagné dans sa dernière demeure par les fils de ceux qui avaient été sur le point de l’accompagner eux-mêmes sur l’échafaud.
L’illustration de François-Xavier Prieur parue dans Le Monde illustré du 14 février 1891 apparaît à l’adresse suivante : http://bibnum2.banq.qc.ca/bna/illustrations/accueil.htm, au descripteur «Prieur, F.-X. (François-Xavier) 1814-1891».
François-Xavier Prieur a sa biographie dans l’Australian Dictionary of Biography.
après consultation rapide, le lien pour les notes d un condamné politique me semble d un grand intérêt. merci de nous l avoir fait découvrir ici. quel point sensible, les patriotes. trouvez-vous qu ils sont assez (re)connus des québécois ? il me semble que pas assez.
Vous avez bien raison, chère Vous, de poser cette question. Si je me fie à la presse québécoise d’il y a cent ou cent vingt ans, je dois conclure que nos Patriotes, très malheureusement, n’ont plus aujourd’hui la place qu’ils avaient. Je crois qu’il faudrait absolument rafraîchir notre discours à leur sujet. Expliquer calmement, pas à coup de bannières et de déguisements nationaleux, qui ils étaient, en quoi ils croyaient, quels étaient leurs espoirs. Vraiment rafraîchir notre propos, parler sérieusement d’eux, avec nos mots calmes d’aujourd’hui et non pas en copiant des discours enflammés d’il y a 60 ou 70 ans. Ces hommes, ces femmes, ces familles se sont élevés alors en différents points du Québec. Et ils méritent bien davantage que du larmoiement passé date. J’ai pour eux un très grand respect.
Merci, chère Vous, d’avoir posé cette question.