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Le tout premier défilé du Père Noël

À la fin du 19e siècle, en ville, sitôt décembre venu, voilà que le Père Noël est présent dans certains magasins. La nouvelle apparaît dans les journaux, sous la forme, bien sûr, d’une publicité. On l’appelle alors Santa Claus.

À l’occasion, il prend place dans la vitrine, se berçant et saluant les passants dans la rue. On imagine les enfants s’agglutinant sur le trottoir, espérant des façons du personnage.

Le mardi 11 décembre 1906, coup de génie de leur part, les grands magasins Paquet, de la rue Saint-Joseph, à Québec — la rue des grands magasins —, imaginent faire défiler le héros saisonnier dans les rues de la ville, avant sa venue à l’intérieur de l’édifice, drainant ainsi la population vers les lieux du Royaume des jouets. Jamais un commerçant du Québec n’avait pensé une pareille mise en scène.

Le lendemain, 12 décembre, le journal Le Soleil décrit l’événement.

Arrivée de Santa Claus.
Une grande foule lui a souhaité la bienvenue.
Hourrah pour Santa Claus !

Le bon vieux est arrivé à Québec après un long et fatiguant voyage du Pôle Nord, une partie du voyage en traîneau attelé de rennes, et la seconde partie par voie de chemin de fer.

À trois heures précises, le train du C. P. R. entrait en gare, mardi après-midi, aux acclamations enthousiastes des milliers de personnes qui s’y étaient rendues afin de voir Santa Claus. Tous les yeux étaient fixés sur le premier compartiment; mais déception, Santa se trouvait dans le dernier, et quand il fut en vue, ce fut une véritable ovation.

Le bon vieux traversa toute cette foule, saluant et souriant à tout un chacun, et l’accueil qu’il reçut à la gare était digne d’un si grand personnage. Avec l’aide de deux hommes de police colossaux, Santa Claus se fraya un chemin parmi cette grande foule si enthousiaste jusqu’à son traîneau  qui l’attendait au dehors de la salle d’attente.

Il ne fut pas plus tôt assis qu’une jeune mère, portant dans ses bras un beau bébé, s’approcha du traîneau afin de permettre à son enfant de voir de plus près la figure du bon vieux Santa Claus. Alors Santa Claus, toujours galant, enleva aussitôt une de ses grosses mitaines, et pressa la douce main de l’enfant dans la sienne aux grandes acclamations de la foule.

À ce moment, la fanfare fit entendre ses sons harmonieux et la procession se mit en marche. Elle défila par les rues St-Paul, St-Pierre, Côte de la Montagne, St-Louis, Grande-Allée, Avenue des Érables, rue St-Jean, Côte St-Georges [aujourd’hui côte d’Abraham], St-Vallier, Arago, Aqueduc, St-Vallier, St-Joseph, jusqu’à la porte d’entrée principale des grands magasins Z. Paquet.

Sur tout le parcours de la procession, des jouets et des boîtes de bonbons ainsi que des cadeaux utiles furent distribués à la foule qui se trouvait de chaque côté des rues. Des milliers de cadeaux furent donnés durant la procession qui dura environ deux heures et demie, de 3 heures à 5.30 heures.

Ce n’est pas trop de dire que c’est la première fois que les gens de Québec ont un événement aussi sensationnel tel que l’arrivée de Santa Claus, tel qu’il l’avait promis.

Dans la même édition du journal, le 12 décembre 1906, le journaliste, chargé de tenir la chronique quotidienne de la vie dans le faubourg Saint-Roch, sent le besoin d’ajouter :

Il a été donné à notre population d’assister à un spectacle étrange, hier, nous voulons dire l’arrivée de Santa Claus à la maison Z. Paquet. Précédé de la fanfare de la Garde Champlain, Santa Claus occupait un landau traîné par deux chevaux superbement harnachés.

Suivaient plusieurs grandes voitures chargées de jouets de toutes sortes. Pas n’est besoin de dire que cette procession nouveau genre avait attiré plusieurs milliers de personnes et un nombre encore plus considérable d’enfants, en face des magasins Paquet et sur le parcours de la procession.

Voilà une date capitale pour qui voudra, un jour, faire l’histoire du Père Noël au Québec. C’est là la toute première description d’un Père Noël parcourant les rues d’une ville, non seulement à Québec mais au Québec. À Montréal, le premier défilé du Père Noël, organisé par la maison Eaton, se tiendra en 1925, dix-neuf ans plus tard. Voir http://www.culture.gouv.fr/culture/noel/franc/defile.htm

Ci-haut, la gravure du Père Noël est celle apparaissant dans le journal montréalais La Patrie, le 2 décembre 1901. Je ne connais pas de photographie de ce Père Noël dans les rues de Québec en 1906. Peut-être s’en trouve-t-il dans quelques fonds de famille. Prière de vous manifester si vous en avez une sous la main; nous pourrions tous nous en réjouir.

Par ailleurs, il m’a été donné de faire l’histoire du Carnaval de Québec en 2003. Parfois, je me dis que les organisateurs du carnaval, dès le départ en 1955, se sont inspirés de ce fait pour décider de promener Bonhomme Carnaval dans les rues de la ville. Mais jamais je n’ai trouvé de preuve à ce sujet dans les archives, pourtant fort riches, du Carnaval de Québec.

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