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Le Forepaugh est à Montréal !

En 1900, lorsqu’un cirque se présente par train dans une ville, il arrive la veille des représentations. Le lendemain, en matinée, histoire de mousser sa publicité, il défile dans les rues. On imagine l’ébahissement des populations.

Nous sommes le 19 juin 1899. Le Forepaugh est enfin à Montréal. Le journaliste de La Patrie nous a réservé une place à ses côtés. À l’heure du midi, il y va de la rédaction de son reportage.

Toute la population montréalaise était sur pied ce matin. Elle était échelonnée le long des trottoirs, groupée dans les fenêtres, grimpée sur les toits, rassemblée sur les places publiques dans l’attente d’un événement important.

Cet événement n’était rien autre chose que la grande parade du fameux cirque Forepaugh et Sells.

Cette immense organisation qui rappelle le cirque Barnum et Bailey, dans ses beaux jours, était attendue avec anxiété dans notre ville, et non seulement la population qui vit dans Montréal avait hâte de voir ce cirque colossal, mais encore des foules nombreuses des districts environnants pour jouir des attractions extraordinaires offertes par le cirque Forepaugh et Sells, mais surtout pour en voir l’incomparable ménagerie.

Cette ménagerie  ne compte pas moins de 1000 animaux rares ou sauvages, 14 éléphants monstres et 200 animaux instruits, composant la plus belle collection que se soit jamais faite dans le monde entier.

Tout ce qu’il y a de plus merveilleux, de plus étonnant, de plus souple, de plus riche et de plus éblouissant a été obtenu ou acheté à grand prix par le cirque qui donnera aujourd’hui et demain ses représentations aux terrains de l’exposition.

La grande parade, qui a eu lieu ce matin de huit heures à midi, donne une certaine idée des splendeurs d’une organisation comme celle dont nous parlons. Il était beau de voir défiler les cavalcades, les écuyers et les écuyères, les charriots de toutes sortes, représentant des scènes de l’ancienne Rome, ces éléphants géants dont le poids fait trembler la terre. Ces charriots, ouverts ou fermés, remplis d’animaux très rares ou de bêtes féroces dont les cris sauvages remplissent de terreur ceux qui n’ont pas foi dans la solidité des cages.

Les costumes sont remarquables et le beau sexe — chose rare dans une organisation de ce genre — mérite réellement ce nom.

Aujourd’hui, les représentations ont lieu à 2 heures p.m. et à 8 heures p.m. Les portes sont ouvertes à 1 heure et à 7 heures, de manière à ce que les visiteurs puissent avoir amplement le temps de voir la ménagerie avant d’assister à la représentation.

Les dernières représentations seront données demain à Montréal. En partant d’ici, le cirque Forepaugh ira à Ottawa.

Y allant des plus grands qualificatifs au sujet de ce cirque de passage, le journaliste de La Patrie est tout de même conscient qu’il se livre à une opération géante de promotion. Et il a l’honnêteté de rajouter les lignes suivantes, qui soulèvent le voile sur les manières de s’y prendre des grands cirques américains.

Il n’y a pas que la grandeur et la richesse de ce cirque, écrit-il, qui fassent son succès dans le monde entier.

Il faut mentionner spécialement M. Charles A. Davis, l’agent spécial du cirque Forepaugh & Sells. M. Davis est un homme d’une haute intelligence et d’une grande expérience, dont les services sont indispensables à une organisation colossale comme celle qui est en ville aujourd’hui.

Il ne faut pas oublier non plus M. Miller, l’agent de publicité.

Ces deux messieurs ont invité, hier, les représentants de la presse à se rendre au St-Lawrence Hall et les ont accompagnés aux terrains de l’exposition. Un lunch délicieux fut offert aux représentants des journaux dans une des tentes du cirque et tout le monde n’a eu qu’à se louer de la manière gentille et distingués avec laquelle la réception a été faite.

C’est certain, le jupon dépasse. Mais, allez, ne boudons pas notre plaisir. Un billet pour le Forepaugh ? Pour la représentation de cet après-midi ou celle de ce soir ?

 

L’image accompagnant cet article apparaît sur le livret du disque audionumérique de Bert Jansch publié en 1995, When The Circus Comes To Town (Cooking Vinyl, TSND 0098). Né à Glasgow, en Écosse, en 1943, fondateur du groupe Pentangle durant les années 1960, avec John Renbourn, Jacqui McShee, Danny Thompson et Terry Cox, Jansch est cet immense compositeur et chanteur folk, que le Guardian, de Londres, a qualifié un jour d’un des plus influents musiciens de tous les temps.

 

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