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Contribution à une histoire québécoise du jouet

Certains jours, il me semble que je ne fais que proposer de nouvelles pistes en histoire. René Lévesque me disait « Parfois, j’ai l’impression d’être un vieux record. » Nous avons tant mis de temps, au fil des années et des années, à l’histoire religieuse et l’histoire politique que de nombreux secteurs ont été complètement oubliés. Qui donc, par exemple, nous fera cadeau un jour de la grande histoire québécoise du jouet ?

Dans mon métier, je suis toujours demeuré éveillé lorsque, soudain, surgissait le jouet. De manière immédiate, on trouve déjà sur ce site plus d’une vingtaine d’articles où il est fait mention de jeux ou de jouets. Vous trouvez d’ailleurs un texte sur les jouets à Québec au cours de la première moitié du 19e siècle.

Aujourd’hui, le moment de l’année s’y prêtant, pourquoi ne pas regrouper un certain nombre de passages que j’ai trouvés sur le jouet ?

En 1875, l’écrivain Napoléon Legendre (1841-1907) publie à Québec un petit ouvrage, À mes enfants. Voici à travers ce livre l’évocation de jouets d’enfant. Allez, rêvez maintenant.

Lorsque sa fille Gabrielle vide le contenu de sa banque, une petite boîte en fer, sur le tapis, elle constate qu’elle a vingt sous en réserve. « Petite mère, demande-t-elle, à sa mère, vois donc comme je suis riche ! Qu’est-ce que je pourrais bien faire avec vingt sous. » Sa mère lui répond : « Bien des choses, mon enfant ».  Voyons, dit Gabrielle, je pourrais acheter un voile neuf ou des gants pour ma poupée, une corde à danser, un cerceau, un cerf-volant…» Un peu plus tard, durant la journée, voilà l’enfant dans une boutique tenue par une marchande de jouets. « Il y en avait de toutes sortes, dans la vitrine, sur le comptoir, au fond des tablettes et jusque sur la rue. Tout cela était fardé de couleurs brillantes. Il y avait des ânes, des moutons, des vaches couvertes de vrai poil, des toupies-caméléons, des poupées parlantes, des billes, des tambours et autres instruments de tapage. […] Un chat blanc, entre mille, avait presque gagné son cœur, mais resta néanmoins sur sa tablette : car il coûtait vingt-cinq sous et la maman aurait été obligée de suppléer les cinq sous qui manquaient. » Plus tard, Legendre mentionne le jeu des osselets.

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Puis, quelqu’un qui signe Mirlton y va d’un texte, À bébé, dans Le Monde illustré du 22 décembre 1888.

Je suis allé, à ton intention, flâner dans les magasins de jouets. Rien de bien nouveau, tu sais encore; sera ce, comme l’an dernier, la petite locomotive de carton, ou les lutteurs comme l’année d’avant, ou comme l’année d’avant encore, les forgerons de fer-blanc frappant alternativement à tour de bras les enclumes d’étain, ou sera-ce une scie ? […] Belle marquise, monsieur Polichinelle, ce beau général sur son beau cheval, il exhibe son bel uniforme de carton peint. […] Le tambour ! la trompette ! l’harmonica ! la flûte !… Et moi, gamin, qu’une mouche qui vole distrait quand j’écris, me rompras-tu la tête ? Non. C’est bien. Alors décrochons cette autre chose d’un aspect plus rassurant : une ligne à pêche, une casquette à visière, un filet et douze poissons rouges en zinc y sont accrochés, c’est très joli — dans un bassin. […] Ce vase de bois, ce râteau, cette pelle, ces attributs de jardinier sont bien ton fait. […] Oh ! le beau chemin de fer, avec stations, gare de marchandises, rails, locomotives, wagons-lits, tout ce qu’il faut pour voyager; merveille des merveilles. C’est joli, c’est habilement construit et cela roule ! — mais c’est en fer-blanc colorié.

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Dans Le Monde illustré du 30 décembre 1893, Pierre Bédard s’attarde à décrire les cadeaux qu’un enfant peut trouver un matin du jour de l’An

Dans une boîte se trouve une ménagerie complète, avec des petits arbres et des petites maisons; dans une autre, tout un régiment de soldats de bois peints de couleurs brillantes; dans celle-ci, de petits wagons conduits par de beaux chevaux blancs, probablement des chars urbains en miniature, plus faciles à contrôler que ceux de la compagnie des chars urbains de notre ville; dans celle-là, un képi rouge avec ruban d’or, épée et trompette argentées.

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À Chicoutimi, le 13 décembre 1906, Lemieux & Carrier, de la rue Racine, s’annonce dans Le Progrès du Saguenay. « Cette année, nous avons installé un département spécial pour les jouets. Des centaines de clients de Noël et du jour de l’an le visiteront chaque jour, nous l’espérons. Nous avons des poupées en pierre, en caoutchouc, en biscuit, etc…. des grosses, des petites, d’autres qui dorment, etc., etc. Des jouets de tous genres et de tous prix, des jouets mécaniques, des engins, des automobiles, des vaisseaux de guerre, la plus belle collection d’animaux de toutes espèces, des pompiers, des canons, des lanternes magiques, etc., etc. »

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Dans le journal Le Soleil du 27 novembre 1908, les magasins Faguy, Lépinay et Frères, du faubourg Saint-Jean, à Québec, s’annoncent. « Santa Claus. Le personnage bien connu des enfants a commencé à faire parler de lui, et un coup d’œil dans les vitrines des magasins Faguy, Lépinay et Frères fait voir que nous aurons encore la visite du fameux roi des jouets, cette année. Maisonnettes illuminées; arbres, polichinelles, petits chevaux de bois avec armée formidable de soldats du même calibre, poupées, etc., tout cela vous attire déjà la marmaille devant les vitrines et pourtant il y a encore un grand mois avant la période de Noël et du Jour de l’An. »

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Selon Le Soleil du 14 décembre 1908, on trouvera les jouets suivants dans les magasins Paquet, de la rue Saint-Joseph, à Québec. Toupies musicales, chevaux, soldats, chevaux qui se balancent, bugles [cornets] en ferblanc, pianos, tambours, automobiles, cheval et charrette de ferblanc, locomotive et tender, poupée de caoutchouc, bateaux, jouets mécaniques, tire-lire de ferblanc, engins à mouvements d’horloge, singes grimpants, blocs de fantaisie, bateaux mécaniques, arbres de Noël, pompes à incendie, bouffon portant cymbales, éléphants à tête mobile, jeux de quilles, poupées habillées, agneaux, traîneaux d’enfant, accoutrements de soldat.

 

L’image provient de Mon premier livre de lecture, textes de Marguerite Forest et Madeleine Ouimet, illustrations de Jean-Charles Faucher, Montréal, Librairie Granger Frères Ltée, 1964. Il s’agit d’un ouvrage approuvé par le Conseil de l’Instruction publique de Québec, à sa séance du 12 mai 1943.

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