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Un singe à l’église

singe deguisementLe 3 décembre 1890, le quotidien montréalais L’Étendard raconte cette histoire qui lui parvient de Savannah, aux États-Unis.

Un de ces dimanches derniers, un singe, très bien apprivoisé et l’idole de sa maîtresse, eût l’idée, si toutefois les singes ont des idées, de se rendre à l’église pour y rejoindre ses maîtres qui étaient partis pour le service. Aussitôt pensé, aussitôt fait et Jocko, tel était le nom du singe, part pour le temple.

Il entre à l’église, et de saut en saut, de gambade en gambade, il se rend près du chœur, se met à tout inspecter autour de lui et, à la grande surprise de tous les fidèles, monte sur la balustrade qui sépare le chœur de la nef et s’élance sur une fenêtre et s’y assis gravement. Tout le monde était ébahi et ne savait que penser du nouvel arrivé qui semblait prendre son air le plus sérieux.

Le premier moment de surprise passé, chacun étouffait de rire tout en se retenant le plus sérieusement possible.

Le fameux singe remuait toujours de la manière la plus comique et saluait chacun. Tout à coup, il lui vint une idée. Il venait d’apercevoir sur le côté opposé le chœur des dames qui psalmodiaient l’office. Jocko lève la tête, regarde et semble mesurer la distance qui le sépare des aimables chanteuses; mais trouvant apparemment la distance trop grande pour risquer un saut, il descend prestement de sa fenêtre et se met en frais de se rendre de l’autre côté en suivant une galerie en fer qui se trouvait en arrière de l’autel, et, de banc en banc, il arrive aux chanteuses. Les dames se sauvent vite dans toutes les directions et font le passage libre au nouvel arrivé. Seul un jeune Monsieur voulut lui faire face; mais le vilain Jocko semble le défier et lui fait face et gravement assis, il semble attendre que le chant, qui était interrompu, reprenne son cours. Après quelques instants, il retourne en bas, poursuivi par le gardien qui, armé d’une longue canne, était arrivé pour chasser le malencontreux visiteur.

Durant tout ce temps, le ministre avait interrompu son service et les fidèles étaient tous levés attendant la fin de la scène.

Tandis que tout le monde était ainsi dans l’anxiété, le bedeau et le singe s’amusaient à une vraie course au clocher. Le singe en avant sautait de banc en banc et le bedeau armé de sa longue perche ne cessait de lui faire la chasse. Enfin rendu en bas du temple, maître Jocko escalade de nouveau une fenêtre et s’y assis gravement comme si rien n’était, semblant dire à son persécuteur : Viens-y si tu peux. Le bedeau, voyant qu’il était impossible de mettre Jocko à la raison, retourna à sa place et le service reprit son cours avec le plus grand sérieux.

 

L’image ci-haut montre bien sûr Jocko. Elle est extraite de la bande dessinée de Hergé, Le Manitoba ne répond plus, Les aventures de Jo, Zette et Jocko, Tournai, Éditions Casterman, 1952, p. 13.

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