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Apparence que les braconniers ont déjà fait leurs coups

En 1900, la chasse aux canards s’ouvre le 15 septembre. Mais en restera-t-il le long des rives du lac Saint-Pierre ? Le journal La Patrie du 16 septembre 1902 se le demande et constate que le gibier de cette mer intérieure québécoise a été détruit avant même l’ouverture de la chasse.

Feu ! Le coup de minuit d’aujourd’hui a donné le commandement aux chasseurs de canard noir qui attendent, le doigt à la détente, que sonne le 15 septembre pour chasser selon la loi. Car, entre nous, il y a beau temps que la chasse au canard est commencée, particulièrement sur les bords du lac Saint-Pierre, où les chasseurs ne trouveront plus guère de gibier aujourd’hui pour l’excellente raison qu’il a été à peu près complètement chassé avant l’ouverture.

Dans les baies Saint-François et Lavallière, entre autres endroits de la rive sud du lac, le canard se chasse depuis quinze jours, pas au grand jour parce que les braconniers font leurs coups la nuit, mais non moins effrontément. Est-ce incurie, est-ce incompétence, est-ce complicité de la part des gardes-chasse, personne ne le sait; mais ce qui est connu de tous, c’est que l’abus s’est pratiqué comme s’il n’eût pas été un abus.

On y rapporte que des chasseurs de Sorel et d’Yamaska ont, en temps prohibé, abattu un si grand nombre de canards qu’afin de les conserver ils ont dû faire venir de Montréal des tonnes et des tonnes de glace. On rapporte aussi qu’un garde-chasse a lui-même donné l’exemple de l’infraction aux lois en chassant de plus belle et en faisant usage d’appeaux.

Les chasseurs qui, malgré leur vigilance, arrivent au moment où il ne reste plus de canard ne digèreront pas aussi facilement leur déception et réclameront une enquête. À défaut de gibier, ils tireront sur les gardes-chasse.

Par contre, les habitants de Saint-Barthélemi et de Maskinongé se félicitent de la surveillance de M. Eugène Adam, garde-chasse du Club de Chasse et de Pêche, qui a tenu en respect les chasseurs trop empressés à massacrer le gibier de la rive nord.

Le magnifique appelant, non signé, coiffant cet article, vaillant, ayant manifestement traversé tous les temps, se veut un Canard branchu, ou Canard huppé (Aix sponsa, Wood Duck) et provient justement de la région du lac Saint-Pierre. Charles-Eusèbe Dionne, dans Les Oiseaux de la Province de Québec (Québec, Dussault & Proulx, 1906), écrit à son sujet : Ce joli Canard est, sans contredit, le plus beau et le plus élégant de tous ceux qui nous visitent durant l’été. Une particularité de mœurs qui le distingue de la plupart des autres Canards, c’est qu’il a l’habitude de percher sur les arbres, ce qui lui a valu le nom vulgaire de Canard branchu qu’il porte.

En 1900, cet oiseau, que beaucoup de naturalistes et de chasseurs considèrent comme le plus beau canard d’Amérique du Nord, est à peu près disparu, tant on lui a fait la chasse. Il faudra la mise en place de mesures très restrictives de 1918 à 1941, y compris l’interdiction totale de la chasse, pour le voir réapparaître.

Contribution à une histoire de la vie de relations autour du lac Saint-Pierre.

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