Arrêt sur l’écureuil roux
Je laisse la parole à Bernd Heinrich, professeur de biologie à l’université du Vermont. Il habite cet état américain de la Nouvelle-Angleterre et possède aussi un chalet dans le Maine.
Le plus commun, le plus voyant et le plus bruyant de nos écureuils indigènes est le petit roux Tamiasciurus hudsonicus […] C’est la « sentinelle de la taïga » pour reprendre le surnom que Wiliam O. Pruit jr. lui donne dans son petit livre intitulé Les Animaux du Nord que j’ai chéri longtemps.
Il laisse partout des signes de sa présence : des cônes de bractées de pin ou d’épicéa fraîchement éparpillés sur la surface de la neige, des trognons de cônes rejetés sur un bûche, où les tunnels pénètrent à la base d’une souche de vieux pin. De nouvelles traces apparaissent après quasi toutes les nouvelles chutes de neige, et celui qui les aura laissées sera vraisemblablement juché sur une branche juste à côté d’un tronc au-dessus de votre tête. […]
Les écureuils roux américains sont des actifs acharnés tout l’hiver. Ils ne semblent pas hiberner. Pourtant, en cas de périodes de froid extrême, les bois sont silencieux et ils se terrent plusieurs jours d’affilée dans leurs terriers souterrains sous une souche ou sous des racines d’arbre.
Une fois sous terre, ils se trouvent presque entièrement protégés du froid. Une partie d’entre eux, particulièrement vers l’ouest, réalisent de grandes caches à nourriture pour les cônes à graines, ce qui vraisemblablement leur permet de rester actifs. […]
Pour combattre le froid, leur stratégie est d’entreposer de la nourriture s’ils en ont la possibilité, de trouver des aliments de substitution si nécessaire, et de rechercher un abri, d’autant que leur manteau de fourrure isolant gagne en épaisseur, se teintant d’une couleur rouille intense. […]
Bernd Heinrich, Survivre à l’hiver, L’ingéniosité animale, traduit de l’anglais par Bertrand Fillaudeau, Paris, Éditions Corti, 2018, p. 107s. Collection Biophilia.