Le cheval et la ville
À tourner les pages des journaux anciens, on en vient à se demander si le cheval est une bête bien acclimatée à la ville, si sa vie de citadin ne le rend pas particulièrement nerveux. Les mentions de chevaux qui prennent soudain le mors aux dents, si constantes, pourraient se décliner comme une litanie.
Voyez ces quelques exemples.
Nous sommes ici à Québec, dans le faubourg Saint-Roch. Sous le titre de Cheval emballé, le journal Le Soleil du 31 juillet 1908 rapporte cette nouvelle.
Le cheval d’un nommé André Renaud s’est emballé ce matin sur la rue St-François. Le cheval a été effrayé par un papier volant au vent. La voiture a été fort avariée.
Toujours à Québec, cette fois-ci le 19 mars 1908. Il appert que M. Bussière [un laitier] était à dételer son cheval, rue St-Anselme, pour le conduire chez un maréchal ferrant, quand une courroie du harnais toucha le cheval sur une patte. L’animal partit à l’épouvante, laissant sa voiture sur un poteau et continuant sa course furibonde ne traînant plus que les timons de la voiture.
Et ce texte magnifique, extrait du journal Le Progrès du golfe, de Rimouski, daté du 14 avril 1905, titré : Les chevaux qui sont effrayés :
Beaucoup de conducteurs commettent la faute, lorsqu’ils doivent attendre, devant une barrière fermée, le passage d’un train, de placer les chevaux de manière à ce qu’ils ne voient pas le train. Les animaux n’entendent ainsi que le bruit, prennent peur, deviennent rebelles et font des efforts pour s’emporter.
Le conducteur qui ne veut ou ne peut comprendre qu’il est le coupable par son défaut d’intelligence, frappe le cheval apeuré jusqu’au moment où celui-ci affolé par le bruit et les coups s’échappe et brise la voiture. Le pauvre cheval se figure alors que les coups, les blessures, que tout ce qui lui arrive est le fait du train et dès lors, lorsqu’il en aperçoit un, il est impossible de le maîtriser, il devient fou et s’emporte.
Il faut au contraire placer le cheval de telle façon qu’il voit arriver le train de loin, descendre de voiture, se placer à côté de lui et le caresser pour le rassurer.
Quel beau texte !
Texte apparaissant aussi dans le quotidien montréalais Le Canada, du 30 mars 1905.
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