À nouveau un poème dans la presse québécoise d’autrefois
Il est de l’écrivain originaire de Nicolet, Napoléon Legendre (1841-1907), dont la production a bien traversé le temps.
Extrait de son recueil Les Perce-neige ; premières poésies, publié en 1886, ce poème dédié à son épouse Marie-Louise Dupré.
Bébé dort
Il est midi. La chambre est sombre ;
À la fenêtre on a cloué,
Pour donner du frais et de l’ombre,
Un grand châle à carreaux, troué.
Dans un coin, la paupière close,
Sur son oreiller de duvet,
Le bébé doucement repose,
Et le chien dort à son chevet.
Alentour, tout se fait tranquille,
On n’entend que le vieux coucou,
Balançant sa tige mobile,
Accroché là-bas à son clou.
À travers les trous du vieux châle
Que son poids fait partout plisser,
Un rayon de lumière pâle
De temps en temps vient se glisser.
Dans l’autre chambre, le potage
Se met sur la table, fumant ;
Le père rentre de l’ouvrage,
Joyeux. Mystérieusement.
La mère, le doigt sur la bouche,
Par la porte ouverte à demi
Lui montre, dans un coin, la couche
Où bébé repose endormi.
Un bras repliée sur la tête
Colle au front ses cheveux mouillés ;
De la couverture indiscrète,
On voit sortir deux petits pieds.
Eux se regardent en silence,
Tout émus, la main dans la main,
Pendant qu’à part soi, chacun pense :
Il aura six mois demain !
Et le quotidien montréalais de rajouter :
N’est-ce pas que c’est frais, gracieux, tout à fait nature ?
On aime à voir cela signé par un Canadien dans un journal de Paris.
C’est une compensation pour la réputation qu’essaient de nous créer en France certains idiots que vous connaissez bien.
Cette charmante petite bluette se trouve dans la « Revue du Monde latin », fascicule de janvier, et porte pour signature : « Napoléon Legendre. »
La Patrie (Montréal), 16 février 1909.
Je ne connais pas Bertile Dugal tout en haut de ce billet. Je reprends ce qui est écrit au verso de cette photographie.