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Retour sur la chasse-galerie

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La chasse-galerie est une légende apportée de France et adaptée au pays par nos voyageurs et coureurs de bois. […]

En Saintonge, d’où nous vient la légende, la chasse-galerie est encore aujourd’hui l’une des vieilles terreurs de la campagne. On y définit par là le passage bruyant, durant la nuit, d’une troupe de diables sifflant, hurlant, faisant claquer des fouets et emportant des quartiers d’hommes. Les esprits forts, par contre, soutiennent que tout ce beau vacarme est en réalité causé par des vols de cigognes et de canards siffleurs, qui effraient les pochards attardés sur les routes.

Nous venons de rencontrer, dans un ouvrage de Pierre Loti (Livre de la pitié et de la mort, p. 123), quelques lignes relatives à ce sujet et que nous croyons utile de rappeler ici. Pierre Loti relate, en ces lignes, un souvenir de sa jeunesse, et la chose se passe dans l’antique demeure de sa famille, sise précisément dans l’ancienne province de Saintonge :

Dans le grand silence, nous avions entendu passer au-dessus des toits… un vol d’oies sauvages qui émigraient vers d’autres climats; un peu une musique de chasse-galery, un bruit de voix aigres, très nombreuses gémissant toutes à la foi…

M. Louis Fréchette, qui tient aussi pour l’origine française du mot, citait, dans une de ses chroniques de La Patrie, un autre fait bien concluant :

Dans le district de Québec, raconte-t-il, la chasse-galerie se rapproche plus de la légende française. Un homme est allé à la chasse pendant la grand’messe le dimanche, et, depuis lors, il parcourt les airs avec ses chiens en criant : «Tayaut ! tayaut !…

Or, la preuve que la légende est d’origine française, c’est que ce terme de chasse est complètement inusité au Canada; il ne s’est conservé que dans la légende.

La chasse-galerie n’est plus maintenant qu’une tradition au Canada, et l’on trouverait à peine quelques rares «vieux de la vieille» pour y ajouter foi. Mais, même dans le temps où la crédulité de nos pères s’exerçait à cet endroit, la chasse-galerie n’inspirait aucune crainte. Presque toujours, elle se présentait sous forme d’une bande de joyeux lurons, chantant force gais refrains et pagayant avec vigueur leurs canots d’écorce à travers les airs.

D’autres fois encore, c’était une troupe de chasseurs, se suivant à la queue-le-leu à la crête des nuages, et ce dût même être là ce qui a donné lieu à l’étymologie primitive du mot : la galerie ou bande de chasseurs. Par les belles nuits tranquilles, nous raconte-t-on, on entendait tout à clair le galop des chevaux, l’aboiement des meutes, l’hallali des cors, etc.

 Sylva Clapin.

 

Le Monde illustré (Montréal), 17 novembre 1900.

L’illustration du peintre Remi Clark apparaît dans le livre de Fernand Grenier, De Ker-Is à Québec, Légendes de France et de Nouvelle-France, (Québec, Éditions de La Galerie Le Chien D’Or inc., 1990).

On retrouvera sur ce site d’autres billets ou simples mentions de la chasse-galerie.

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