Le calme de l’été dans une petite ville comme Saint-Jean-sur-Richelieu
Autant dire, par exemple, que le palais de justice est fermé. La criminalité prend des vacances.
Durant le temps de la grande vacances, nos tribunaux chôment, la salle d’audience devient déserte, tout au plus voyons-nous quelques ombres fugitives s’approcher, de temps à autre, de la Cour du magistrat de district où siège Son Honneur le juge Loupret. Quelques accusations de vols, de larcins, d’assaut, s’y déroulent, l’on dirait amicalement, et tout le monde, juge, avocats, prévenus (ces derniers surtout) s’ingénient à précipiter les procès afin d’aller respirer le grand air au dehors.
Tout est calme ailleurs et le temple de la chicane a perdu son charme attirant pour deux mois.
Mais savez-vous que dans certains quartiers, l’on murmure contre la grande vacance l’accusant de paralyser les affaires et de favoriser les débiteurs récalcitrants qui obtiennent par ce moyen un répit de deux mois.
On a certainement raison dans quelques cas; mais chaque chose a son bon côté car pour plusieurs débiteurs, ce délai est souvent la planche de salut. Pour plusieurs, l’exécution forcée contre les meubles et immeubles aurait été la ruine, tandis que souvent ce délai leur permet de financer de quelque manière et de pouvoir à la fin contenter leurs créanciers et réussir à mettre les deux bouts ensemble.
Dans les grandes villes, il se pourrait qu’on eût raison jusqu’à un certain point de demander sinon la disparition complète de la vacance, du moins sa réduction de moitié. Les affaires des campagnes souffrent moins de ce repos forcé destiné à récupérer les forces épuisées de nos avocats par dix grands mois de lutte et tracas.
Le Canada français, 13 juillet 1894.
La photographie de bateaux de plaisance amarrés dans une marina de Saint-Jean-sur-Richelieu prise par Armour Landry vers 1967 est déposé à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec dans le Vieux-Montréal, Fonds Armour Landry, Photographies, cote : P97,S1,D7653-7653.