Une traversée du Fremona peuplée de fantômes
Ce navire, de la ligne Thomson, est très connu au Québec, car il est, habituellement et pendant plusieurs années, le premier océanique à se présenter au printemps avec une cargaison de citrons et d’oranges en provenance de Messine et Palerme, en Italie.
L’une de ses traversées fut mémorable. Le quotidien montréalais La Patrie, du 3 juin 1909, en fait sa une.
Une bien bonne histoire, c’est celle qui est arrivée à l’équipage du cargo «Fremona» de la ligne Thomson, qui est arrivé, hier soir, dans le port de Montréal, de retour d’un voyage aux différents ports de la Méditerranée. Il faut entendre l’un des matelots même raconter les aventures de la traversée pour en goûter toute la saveur.
Le «Fremona» avait à bord une cargaison de vingt énormes pierres tombales qui furent déchargées à Boston. En passant dans le détroit de Messine, près de la ville récemment détruite par le tremblement de terre, le vent de la côte apporta à l’équipage du bateau l’odeur nauséabonde de cadavres en pourriture.
Une folle superstition s’empara des matelots. Ils crurent voir des fantômes entourant constamment leur navire, dansant sur le pont, venant les troubler dans leur sommeil et dans leur travail, et les malheureuses pierres tombales à bord du bateau furent accusées d’être la cause de ces apparitions d’êtres fantastiques, protestant contre le manque de sépulture.
Bref, ce fut une demi-panique, car les matelots refusèrent de travailler la nuit. Aujourd’hui encore, ils n’ont pas changé d’opinion. Ils ont bien vu des fantômes au milieu de l’épais brouillard qui n’a cessé de les accompagner pendant tout leur voyage, et qui n’était, d’après eux, bien entendu, qu’une résultante de leur infortunée cargaison.
Aussi, ne parlez plus du transport de pierres tombales aux matelots du «Fremona».