À Montréal, on fait un procès à un chat
Que faire lorsqu’un raminagrobis, la porte étant ouverte, entre chez vous en votre absence et casse quelques-unes de vos belles porcelaines ? Lui intenter un procès, au risque de susciter une chicane entre voisins. Voilà. C’est bien ce que nous apprend La Patrie du 10 avril 1908.
Un procès où un chat était accusé de multiples méfaits vient de se terminer en l’honneur du félin, maître Raminagrobis ayant réussi à prouver un alibi.
Voici l’histoire :
Les familles Truesdell et Hétu vivaient en bonne intelligence, quand un fâcheux incident vint mettre, dans le ciel pur de leur bonheur, un nuage.
M. S. Truesdell, le demandeur, s’étant absenté de son logis avec les membres de sa famille, constata, à son retour, que des mains peu expérimentées avaient joué avec la vaisselle : un plateau en verre coupé de la valeur de $15, un plateau en porcelaine de la valeur de $10, et un service à limonade payé $5.00, étaient réduits en pièces
Soupçonnant quelque tour du matou du voisin, M. Truesdell poursuivit son voisin, M. A. Hétu, et lui réclama la somme de $30.00, valeur de la vaisselle endommagée.
Le chat ne comparut pas en cour; mais on prit quand même sa défense. L’avocat de M. Hétu allégua que «le chat est un animal impossible à tenir prisonnier et qu’il lui est naturel d’être constamment en incursions».
Sans adjuger sur cette question d’histoire naturelle, Son Honneur le juge Purcell, vu la preuve qui établissait que le chat soupçonné n’était pas le seul des environs et que le délit commis pouvait parfaitement être l’œuvre d’un autre maraud, a renvoyé l’action avec dépens.
N’importe : un chat averti en vaut deux. Et si le mis en cause — c’est du chat dont nous parlons — s’avise jamais de toucher à un service à limonade, il fera patte de velours.
Le nom de Raminagrobis a eu une belle carrière. Voir, par exemple, cette page Wiktionnaire.
