À l’écoute de l’Univers
Grâce au radiotélescope Chime, mis en place en Colombie britannique, nous voici « bras tendus » à écouter l’Univers. Se peut-il qu’on nous parle ?
L’été dernier, Chime avait détecté 13 « sursauts radio rapides » (pour fast radio bursts), sorte de pulsation, de battement, bouffées d’ondes radio aussi brèves que violentes, parmi les signaux, les plus énergétiques et les plus énigmatiques que nous avons reçus à ce jour.
Tristan Vey, grand reporter au service Sciences Médecine chez Le Figaro, y va d’un fort intéressant papier dans le quotidien français Le Figaro.
Après un premier signal en 2012, le FRB 121102, et celui de l’été dernier (FRB 180814), « avec deux éléments, nous avons déjà une famille », dit en riant l’astrophysicien Fabrice Mottez, du Laboratoire univers et théories de l’Observatoire de Paris. « Cela laisse penser qu’il doit exister un mécanisme standard pour expliquer ces signaux étranges » de dire Mottez.
Et Vey d’enchaîner :
Pour ce qui est d’expliquer la nature profonde des FRB, toutes les hypothèses restent encore ouvertes. Les théoriciens ne manquent jamais vraiment d’idées. Avec son collègue Philippe Zarka, Fabrice Mottez envisage par exemple qu’il puisse s’agir d’une émission extrêmement focalisée, moins dispersée qu’un laser, qui pointe directement vers nous. Des phénomènes d’accélération de particules chargées dans des champs magnétiques très intenses peuvent créer de tels pinceaux d’ondes radio. Cela permettrait d’expliquer avec ce scénario leur nature ponctuelle ou leur répétition aléatoire. Invoquer des phénomènes cataclysmiques comme des explosions d’objets exotiques ou des fusions d’astres serait tentant. Mais comment expliquer alors l’absence totale de rayonnement visible, UV, X ou gamma que ces événements ne manqueraient pas de produire ?
À compter de 2007, on a perçu quelques phénomènes semblables. Vey affirme que les chercheurs penchent pour une origine hors de la Voie lactée.
Le premier FRB « répéteur » est le seul dont l’origine exacte a pu être identifiée : le bord d’une petite galaxie très lointaine et tout à fait banale située à six milliards d’années-lumière de nous (en d’autres termes, il a fallu près de la moitié de l’âge de l’Univers à sa lumière pour nous parvenir). Les autres flashs sont trop brefs et ponctuels pour qu’on puisse déterminer leur origine précise. Rappelons que dans un minuscule coin du ciel 100 fois plus petit que la pleine lune, le télescope spatial Hubble parvient à discerner une dizaine de milliers de galaxies ! Cela donne une idée de la précision qu’il faut atteindre lorsqu’on veut déterminer précisément la source d’un signal observé depuis la Terre, Quand celui-ci ne dure pas plus longtemps que le flash d’un appareil photo et qu’il provient d’aussi loin, la mission devient quasi impossible. Ce qui ne facilite pas le travail d’interprétation des astrophysiciens.
Tristan Vey, « De nouveaux flashs radios énigmatiques », Paris, Le Figaro, 10 janvier 2019, p. 14.