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Il est faux de répéter que tout va mal, selon Steven Pinker (second de deux billets)

Ce psychologue né à Montréal enseigne à Harvard.

Hier, sur ce site, on retrouvait les premiers échanges à ce sujet entre lui et le journaliste Marc-Olivier Bhérer. Voici d’autres extraits de cette rencontre.

Vous mettez en cause la presse, mais que peut-elle faire pour aider nos instincts les plus nobles ?

Je ne voudrais pas passer pour un critique de la presse. Les grands médias d’information nous rendent de précieux services. Nous ne pouvons pas laisser se propager les théories conspirationnistes, la désinformation. J’ai un respect d’autant plus grand pour le travail des journalistes que nous vivons à l’ère de Donald Trump, qui considère que toute critique de sa personne relève de l’infox et regarde la presse comme un « ennemi du peuple ». Je trouve ce discours terrifiant. Nous devons reconnaître que la vérification de l’information, l’objectivité, le travail de relecture, les standards de fabrication de l’information maintenus par les grands titres de presse sont des choses magnifiques que nous devons défendre et célébrer.

Néanmoins, toute institution doit exercer un contrôle constant de son fonctionnement, afin de corriger ses erreurs et de s’améliorer. C’est dans cet esprit que je m’autorise à faire certaines observations à propos de la presse. Et je crois que les journalistes doivent s’attacher à ce qui constitue le cœur de leur métier, recueillir des informations, s’appuyer sur des données chiffrées. Ainsi, leurs articles ne deviennent pas plus optimistes, mais plus fidèles à la réalité.

Quels sujets font l’objet, à votre avis, d’une couverture excessive ?

Le premier exemple qui me vient en tête est le terrorisme. Les dommages commis en son nom sont graves, mais moins importants que d’autres phénomènes, les accidents de voiture, par exemple. On insiste également sur les méfaits de la mondialisation, et certes, elle a entraîné la destruction de nombreux emplois. Mais elle a aussi rendu les vêtements et la nourriture moins chers, les pauvres ne sont plus vêtus de haillons, et ne sont plus émaciés comme cela a longtemps été le cas.

Quelles informations démontrant que le progrès est possible et qu’il existe ont, selon vous, été trop peu traitées au cours de l’année qui vient de se terminer ?

Je me réjouis de la fin de la guerre entre l’Érythrée et l’Éthiopie. Près de 80 000 personnes sont mortes à cause de ce conflit à la fin des années 1990. Cette guerre séparait des familles, empêchait l’Éthiopie d’accéder à la mer. Aux Maldives, un gouvernement démocratique a été élu en septembre. En Afrique, la transition démocratique au Nigeria et en Tunisie se poursuit. Il faut aussi saluer le développement de nouveaux antibiotiques qui permettront de dissiper la menace de bactéries résistant à ce type de traitement. L’essor des réacteurs nucléaires modulaires est une autre bonne nouvelle. Cette quatrième génération de technologie nucléaire permettra de construire plus facilement des centrales énergétiques. En outre, elles ne produiront pas de déchets radioactifs et seront plus sûres. Enfin, l’ONU avait désigné en 2000 huit Objectifs du millénaire pour le développement, et celui qui concernait la réduction de la pauvreté, avec  l’espoir de la voir reculer de moitié, a été atteint avec cinq ans d’avance.

 

Marc-Olivier Bhérer, « Steven Pinker : Le progrès existe, il est tangible », Paris, Le Monde, 1er et 2 janvier 2019.

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