Du poète, critique littéraire et romancier suisse Charles Fuster (1866-1929)
Si l’amour prenait racine…
Ah ! si l’amour prenait racine,
J’en planterais dans mon jardin
Pour que ma petite voisine,
Respirant la fleur assassine,
Sentît son cœur battre soudain…
Ah! si l’amour prenait racine,
J’en planterais dans mon jardin.
J’en planterais le long des routes.
J’en mettrais assez pour chacun.
J’en mettrais pour tous et pour toutes,
J’en mettrais assez pour chacun,
Et je resterais aux écoutes,
Attendant qu’il passât quelqu’un.
J’en planterais le long des routes,
J’en mettrais assez pour chacun.
Les garçons cueilleraient la plante,
Et les filles souriraient mieux ;
Avec une douceur brûlante,
Les doigts unis, la main tremblante,
Ils s’embrasseraient sur les yeux…
Les garçons cueilleraient la plante,
Et les filles souriraient mieux.
Toute rieuse et toute franche,
Ma voisine y viendrait un jour.
Et de sa petite main blanche,
Elle briserait une branche
Une branche au rosier d’amour…
Toute rieuse et toute franche,
Ma voisine y viendrait un jour.
Ah ! si l’amour prenait racine,
J’en planterais dans mon jardin !
Pour que ma petite voisine,
Respirant la fleur assassine,
Sentît son cœur battre soudain…
Ah ! si l’amour prenait racine,
J’en planterais dans mon jardin !
Charles Fuster.
Le Canada (Montréal), 1er octobre 1904