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Le chroniqueur Léon d’Ornano, d’origine corse, s’étonne des déménagements du début de mai

Décidément, notre genre de vie moderne a des manifestations qui donnent à réfléchir. À voir Montréal en ces premiers jours de mai, si j’étais un étranger nouvellement débarqué, je pourrais croire à l’exode de sa population.

Sans interruption, à la queue leu leu, passent dans nos rues des charrettes de déménagement. Sous les clairs rayons d’un soleil propice, j’ai vu, depuis moins de vingt-quatre heures, trimballer plus de meubles que n’en contient mainte capitale, et cela continue.

Camionneurs et chevaux sont sur les dents. Aux fenêtres veuves de rideaux apparaissent des silhouettes de ménagères épinglant de temporaires écrans. Des hommes, désertant leurs occupations quotidiennes, courent en s’épongeant le front, derrière des tapissières surchargées d’objets hétéroclites. Montréal fiévreux déménage. Partout, ce sont des éclats de voix, récriminations ou soupirs, faisant songer à de puissantes orgues.

Jamais le désir du changement ne fut poussé plus loin. Il est passé le temps où des générations se suivaient, vivant et mourant sous le même toit. Est-ce un signe des temps, que ce besoin de nouveauté annuelle, dans l’installation de la nichée familiale ; ou faut-il attribuer cet état de choses à la rapacité des « proprios » ? Bien fin qui le dirait.

 

L’Album universel (Montréal), 7 mai 1904. La gravure du dessinateur A. S. Brodeur paraît aussi dans ce numéro.

2 commentaires Publier un commentaire
  1. Anne Marie #

    Nous sommes arrivés, de la Suisse au mois de juin 1969 à Montréal, et au printemps 1970 nous étions très surpris, de voir que tout le monde déménage !

    5 mai 2017
  2. Jean Provencher #

    Merci, chère Anne-Marie, merci beaucoup de ce propos ! Vous savez, c’est une coutume que nous traînions avec nous depuis 1690, depuis le gouverneur Frontenac qui l’avait instituée. Durant tout le 20e siècle, les parents ont protesté, car les enfants devaient alors souvent changer d’école, parce qu’ils changeaient de lieu de vie. À quelques semaines des examens de fin d’année, ça n’avait pas de sens. Finalement, en 1972, on a reporté cette coutume au 1er juillet.

    Belle soirée à Vous et votre cher Heinz.

    5 mai 2017

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