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À Montréal, le moment fait jaser, avec toutes les couleurs du temps

La débâcle, voilà la question du jour.

Sous l’effet des rayons d’un soleil, printanier, des ondées printanières, nos rues malgré leur état fangeux ne nous demandent que quelques semaines pour revêtir leur toilette d’été.

Malgré les traverses boueuses, les piétons n’osent accuser les autorités civiques, car, à quelques distances de nos bureaux, une grande lutte commence.

La glace formée aux premiers jours de froid de l’automne dernier sur nos quais, recouverte ensuite par une couche de neige quasi continue, est complètement disparue.

Lors de sa tournée d’hier après-midi, le représentant du « Canada » s’est permis une petite promenade sur les jetées, tout en suivant le mur de revêtement qui lui permettait de marcher à pied sec et cela sans nuire à l’entretien par nos autorités civiques des trottoirs de la rue des Commissaires et de la rue Common [aujourd’hui la rue de la Commune].

La glace devient rapidement mauvaise, c’est reconnu, mais il n’y a pas encore à s’alarmer, malgré l’assurance gratuite offerte par un confrère à ceux qui auront l’audace de boire la première gorgée des eaux du printemps.

Tout est tranquille sur les quais. À la ligne Thompson [une compagnie propriétaire de plusieurs navires transatlantiques], dont les hangars sont presque vis-à-vis de la maison Madore sur la rue des Commissaires, on voit quelques désœuvrés qui ne viennent que jeter un coup d’œil sur l’état du fleuve ; car il y a un état pour notre fleuve Saint-Laurent tant à l’automne qu’à l’hiver. […]

On rencontre des officiers de ces compagnies [maritimes] qui se contentent d’échanger les mots suivants : « No more ice; the sun has done its work ». Et c’est vrai, car les quais, les voies des chemins de fer [sont] complètement découverts. […]

L’inondation qui a causé le plus de dommages arriva en 1886. Le capitaine Bourassa nous communique ces notes. En cette année mémorable, l’inondation atteignit 44 pieds et 4 pouces au-dessus de l’échelle d’étiage du canal, 46 pieds au-dessus de l’étiage de l’ancien mur de revêtement. Le capitaine Bourassa n’attend pas la débâcle finale pouvant permettre l’arrivée des bateaux océaniques avant la fin d’avril. Il a parié le printemps dernier et ne s’est pas trompé. […] Le capitaine Dallaire, un vieux navigateur qui fait aujourd’hui un commerce de liqueurs ouvre un pari. C’est un vieux loup de mer et ses pronostics sont généralement exacts.

La barge St-Laurent chauffait ses chaudières à toute vapeur, hier après-midi. On l’aurait crue prête à se lancer sur le fleuve. C’est son capitaine M. Langlois, qui aura le privilège du service entre l’île Sainte-Hélène et Montréal, et vice-versa. On s’attend à ce que le capitaine Langlois fasse de son bateau un petit palais flottant.

 

La Canada (Montréal), 29 mars 1905.

Lisant ces lignes, je ne peux que penser qu’un jour quelqu’un nous offrira la grande histoire du fleuve Saint-Laurent.

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